Concilier Maintenance Et Performances Pour La Mesure De Cot En Ligne

Le 01/01/2014 à 14:00

L'essentiel

Le carbone organique total (COT) est un paramètre qui revêt une importance grandissante dans l'industrie.

Sa mesure en ligne intervient dans la surveillance des eaux de rejets, le contrôle de la qualité d'eaux ultra-pures pour des médicaments injectables, etc.

Ces dernières années, les fabricants ont porté leur attention sur le développement de techniques d'oxydation ou de mesure innovantes.

Les évolutions portent également sur la réduction des réactifs et d'autres «astuces» pour tendre vers une utilisation et une maintenance simplifiées… même si les méthodes requièrent toujours des réactifs et autres substances.

La présence, ou plutôt l'absence, de matières organiques dans l'eau peut revêtir une importance capitale dans certains domaines industriels. Par exemple, en pharmaceutique pour la qualité des solutions ajoutées dans les médicaments injectables, ou encore dans les stations d'épuration afin de s'assurer d'une composition des eaux de rejets en adéquation avec les niveaux imposés par la réglementation. L'un des paramètres physicochimiques surveillés pour le contrôle des matières organiques est la concentration de carbone organique total (COT ; voir Mesures n° 789) . Ce n'est pas le seul, comme on le verra plus loin, mais il s'agit de celui qui se prête le mieux pour un suivi en ligne.

Evidemment, comme tout paramètre physico-chimique, il existe une assez grande offre d'appareils de mesure pour la mesure de la concentration de COT –on parle également de COTmètres. Les méthodes privilégiées sont des mesures ponctuelles par prélèvements puis analyses en laboratoire par des prestataires de services, ou éventuellement par un service interne à l'industriel. Parallèlement à ces contrôles en laboratoire, les industriels ont, depuis une quinzaine d'années,mis en œuvre progressivement des mesures en ligne pour le suivi de la concentration de COT. C'est ainsi que les utilisateurs ont vu arriver sur le marché les premiers analyseurs en ligne développés par des fabricants ayant pignon sur rue dans le domaine de l'analyse en laboratoire.

«A l'origine, les mesures de COT en ligne étaient le fait de fabricants d'appareils de laboratoire qui n'avaient pas forcément l'expérience industrielle suffisante en termes d'implantation sur site,de prélèvement dans de la masse, de maintenance, etc. C'est ce qui explique la transition du laboratoire au terrain dans la douleur… », se rappelle Christian Collet, directeur de l'activité Process de Hach Lange France. Ce que confirme la majorité des acteurs : « Les COTmètres avaient des défauts qui impliquaient une maintenance importante et d'autres inconvénients (par exemple, si la tuyauterie se bouchait, l'analyseur continuait néanmoins à pomper). Cela fut, on peut le comprendre, très préjudiciable, sans compter le manque de personnel suffisamment compétent pour bien utiliser ces analyseurs » , explique Bernard Fillion, chef de produits Process chez Metrohm France.

Suivant les applications, grandes différences en termes d'exigences

Pour ces différentes raisons, il y a eu une désaffection du marché il y a cinq, six ans. « Plus généralement, le marché a connu à la même période pas mal de mouvements : le rachat de Maihak par l'allemand Sick et celui du suisse Zellweger Analytics par Hach (groupe Danaher) en 2000, des changements de distributeurs dans le domaine des analyseurs UV-persulfate… C'est ainsi que les fabricants allemands LAR [Liquid Analytical Resource, NDR] et japonais Shimadzu ont profité de la situation pour se positionner sur le marché, d'où l'avènement des systèmes à four », poursuit-il. La situation a commencé à s'améliorer à l'arrivée de nouveaux acteurs venant cette fois de l'instrumentation pour les procédés, avec, pour certains, des méthodes de mesure originales dans leurs bagages.

Le carbone organique total (COT) fait partie des paramètres physico-chimiques surveillés pour le contrôle des matières organiques, car la présence, ou plutôt l'absence, de matières organiques dans l'eau peut revêtir une importance capitale en pharmaceutique, agroalimentaire, semi-conducteurs…

Anael-LAR

« Nous sommes arrivés sur le marché de la mesure de COT en ligne pour les applications pharmaceutiques et des semi-conducteurs dans les années 2005-2006,avec un concept de sondes piquées sur la conduite et associées à un transmetteur. Cette offre, qui est toujours uniquement en ligne, était complémentaire à celle pour les mesures de pH et de conductivité que nous proposions déjà dans ces deux secteurs » , se souvient Philippe Dejour, chef de produits chez Mettler-Toledo Analyse industrielle France. « Il est vrai que, dans le domaine pharmaceutique, la demande en contrôle en ligne a décollé ces cinq dernières années, les mesures en laboratoire et en ligne faisant partie des mentalités chez les utilisateurs de ce secteur », constate Fabienne Tissandier, responsable France de GE Power &WaterWater & Process Technologies Analytical Instruments.

Il existe différentes méthodes de mesure pour déterminer la concentration de COT, mais aucune ne permet de s'affranchir complètement d'un minimum de maintenance, à savoir réalimenter en réactifs chimiques, changer la lampe UV ou simplement contrôler le four pour la partie oxydation. C'est pour cela que les développements portent avant tout sur la maintenance.

Endress+Hauser

On distingue deux grandes catégories d'applications : les industries de la pharmaceutique et de la microélectronique (qui cherchent les traces de COT) et le secteur des eaux de rejets qui est confronté à des concentrations pouvant aller jusqu'à plusieurs pourcents, à des matrices chargées.

Mettler-Toledo Analyse industrielle

Aujourd'hui, la situation s'est encore améliorée grâce notamment à la disponibilité de mesures directes justes, compte tenu aussi du prix réduit des appareils, et des normes qui imposent l'application de méthodes, comme en pharmacopée (USP<643> et EP<2244> pour valider les méthodes de production d'eau purifiée et d'eau pour préparation injectable). « Dans le secteur de l'environnement, les utilisateurs doivent également répondre aux réglementations et aux arrêtés qu'imposent les Dréal [Directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, NDLR] . Si les contrôles ponctuels sont plutôt vus comme une charge, car leurs résultats n'entrent pas dans l'optimisation des process, les mesures en ligne sont plus avantageuses sur cet aspect », ajoute-t-elle.

Pour preuve encore, ces vingt-quatre derniers mois ont vu l'introduction de plusieurs nouveaux modèles, à l'instar des 9210e et 9210p par l'américain OI Analytical (voir Mesures n° 829) , du TOC-4200 par Shimadzu, des versions portables et en ligne CheckPoint Pharma et CheckPoint e par l'américain GE Analytical Instruments, de la sonde Viomax CAS51D par l'allemand Endress+Hauser, des sondes CarboVis 70x IQ par WTW (groupe américain Xylem) et du QuickTOcultra de LAR distribué en France Par Anael. Et n'oublions pas les améliorations de produits existants.Vous ne trouverez toutefois pas dans cette liste, certes non exhaustive, le Tocor 700 TH/UV de Sick, la société s'étant désengagée de ce segment de marché en France.

Cela nous amène à nous intéresser plus particulièrement aux différents secteurs industriels utilisateurs d'analyseurs de COT en ligne. Ils peuvent se distinguer en deux grandes catégories: d'un côté, les industries de la pharmaceutique et de la microélectronique et, de l'autre côté, le secteur des eaux de rejets (stations d'épuration industrielles et municipales). Cette distinction trouve d'abord son origine dans le type et surtout dans la qualité des eaux contrôlées. Si les concentrations de COT en jeu peuvent atteindre plusieurs pourcents dans les eaux de rejets, en présence, de surcroît, de matrices chargées, les industriels de la pharmaceutique et de la microélectronique, eux, traquent des traces de matières organiques dans des eaux pures voire ultrapures.

Méthodes de mesure avec oxydation chimique ou à chaud

Première conséquence, les méthodes de mesure mises en œuvre diffèrent selon que l'on analyse des traces ou non. Et l'on constate également que les fabricants eux-mêmes se sont plutôt spécialisés dans l'un ou l'autre segment de marché. La majorité des analyseurs de COT en ligne disponibles sur le marché reposent sur un principe d'oxydation. « Il existe deux grandes familles d'analyseurs : à oxydation thermique et à oxydation chimique dite également à froid. Cela consiste dans les deux cas à oxyder toutes les matières organiques présentes dans un échantillon en dioxyde de carbone (CO2 )puis à mesurer la quantité de CO2 ainsi produite. Le carbonate inorganique, lui, est soit filtré avant que l'échantillon entre dans le four soit séparé du carbonate organique par réaction chimique », résume Jacques Lachenal, animateur-secrétaire de la commission Pollution Eaux de l'Association des exploitants d'équipements de mesure, de régulation et d'automatismes (Exera ; voir encadré page 28) .

L'oxydation à chaud est la méthode qui reproduit le plus exactement la méthode de référence en laboratoire (selon la norme NF EN 1484). Il s'agit d'une oxydation thermique à haute température, aux alentours de +850, +900°C, voire jusqu'à +1200°C, selon les appareils, oxydation réalisée dans un four. A cette dernière, la combustion de l'échantillon est complète. Quelle que soit la composition de sa matrice organique ou inorganique, toutes les molécules sont alors cassées et recombinées en CO2 .Lamesure de la concentration du gaz est la plupart du temps assurée par un détecteur infrarouge non dispersif (NDIR).

« L'oxydation thermique répond donc aux applications difficiles (usines chimiques, pétrochimiques, aéroports…), avec des matrices présentant des particules, etc. La température d'oxydation est de +1 200 °C sur le QuickTOCultra, mais il est par ailleurs possible d'abaisser la température du four (+ 600 à + 900 °C) par l'adjonction d'un catalyseur », ajoute Christophe Vaysse, ingénieur technico-commercial pour le Grand Sud-Ouest chezAnael.Autres avantages, un minimum de préparation de l'échantillon est requis avant d'être envoyé dans le four, hormis l'utilisation d'acide pour le stripping et d'eau de rinçage, ce qui réduit cette maintenance (un bidon de 5l suffit pour une autonomie d'un mois, par exemple). Pour Bernard Fillion (Metrohm France), « les systèmes à four restent privilégiés pour les analyses de COT en laboratoire, là où l'opérateur a le temps nécessaire pour obtenir une oxydation parfaite… » D'autres analyseurs en ligne mettent en œuvre une oxydation chimique. Il s'agit toujours de casser les molécules de la matière organique, non plus en chauffant, mais en couplant deux actions oxydantes : une oxydation chimique très souvent avec du persulfate pour séparer les parties carbonates inorganiques et organiques, puis un traitement par lampe aux ultraviolets (UV). « Comme on ne peut pas brûler de l'eau,l'utilisation d'une lampe UV à une longueur d'onde de 185 nm permet de casser les liaisons simples, doubles et triples de carbone », rappelle Guillaume Schneider, chef des ventes de Swan Instruments analytiques France. Cette méthode fiable est bien mieux adaptée aux molécules facilement oxydables, et donc plutôt adaptée aux eaux assez propres (eaux de surface, de nappe, rejets industriels, entrée de station d'eau potable…).

Certains fabricants d'analyseurs de COT en ligne ont développé ces dernières années des méthodes originales, telles qu'une oxydation à deux niveaux, une oxydation de l'eau en phase supercritique, une méthode optique, afin d'améliorer encore la maintenance et les performances de leurs appareils.

Hach Lange

Pourquoi parle-t-on aussi de mesure de DCO ?

Selon Bernard Fillion, chef de produits Process chez Metrohm France, «la véritable mesure, celle demandée par les Dréal,devrait être, ou a été, la demande chimique en oxygène ou DCO. C'est le meilleur paramètre pour représenter tout ce qui consomme l'oxygène dans l'eau, c'est-à-dire ce qui fait mourir les poissons.» Il s'agit ainsi du carbone et d'autres composés s'oxydant facilement, tels que les métaux qui se combinent pour créer des oxydes métalliques. «Si les industriels sont intéressés de mesurer le DCO, il n'y a toutefois pas d'analyseurs de DCO en ligne. Le seul lien“direct”est alors la mesure de COT [carbone organique total, NDLR] en ligne via une interprétation» , constate Christian Collet, directeur de l'activité Process de Hach Lange France. «L'un des inconvénients de la corrélation COT/DCO est qu'elle dépend de l'effluent, de sa composition,etc.Cette méthode normalisée qui dure plus de 2 h n'est pas la mieux adaptée aux exigences des industriels qui recherchent des mesures fiables et rapides pour le suivi des effluents», explique Christophe Vaysse, ingénieur technico-commercial pour le Grand Sud-Ouest chez Anael.

LAR propose un analyseur DEO en ligne qui réalise une vraie détermination de la DCO en moins de 3 mn, sans réactifs. «Nous proposons des systèmes de DCO en ligne, insiste toutefois Bernard Fillion (Metrohm France), mais l'investissement dans un tel appareil est le double de celui d'un analyseur de COT. Si la maintenance est similaire entre les deux solutions,il faut que l'échantillon soit chauffé pendant au moins une heure et la méthode de mesure fait intervenir des réactifs chimiques dangereux.»

En plus d'être simple – la maintenance peut très bien être assurée par des opérateurs non spécialisés en chimie –, la tech-nique UV-persulfate présente également une meilleure représentativité que l'oxydation à chaud, de par les volumes d'échantillon utilisés bien plus importants (seulement quelques microlitres pour les systèmes à four). « Parmi ses autres avantages, on peut citer un coût plus faible que les autres méthodes, une utilisation maîtrisée depuis longtemps.A contrario,on ne peut pas prendre directement des échantillons bruts,d'où la mise en œuvre d'une filtration. L'oxydation chimique est plus sensible à la turbidité ce qui peut se traduire par une oxydation incomplète et donc une mesure faussée. Sans compter la vérification et le remplacement fréquent de la lampe UV », énumère Christian Collet (Hach Lange France).

Une apparition ponctuelle des méthodes optiques

En s'intéressant aux avantages et aux limitations des deux méthodes de mesure par oxydation, on se rend vite compte que les aspects de facilité d'utilisation et surtout de maintenance jouent un rôle plus que prépondérant dans les exigences des utilisateurs, donc dans les améliorations apportées ces dernières années aux analyseurs de COT en ligne. Mettler-Toledo Analyse industrielle et Swan Instruments analytiques proposent par exemple chacun une méthode d'oxydation directe par UV, via une mesure de conductivité. « La sonde 5000TOCi ne requiert ni réactifs, ni additifs, ni acides, ce qui permet d'obtenir une vraie mesure en dynamique (il n'y a pas de rinçage, chaque échantillon poussant le précipent). Il s'agit non pas d'une succession de photographies, mais d'un film », compare Philippe Dejour (Mettler-ToledoAnalyse industrielle France). La principale opération de maintenance se résume à remplacer la lampe UV toutes les 4500 heures, et l'étendue de mesure maximale est limitée à 1 ou 2ppm.

La grande majorité des analyseurs de COT en ligne disponible sur le marché repose sur une méthode de mesure faisant intervenir une oxydation à chaud (via un four) ou à froid (via des réactifs chimiques et une lampe UV) pour casser les composés. La mesure se fait ensuite avec un détecteur infrarouge non dispersif ou par conductivité.

Metrohm

D'autres fabricants,à l'image de GEAnalytical Instruments ou de Hach Lange, ont développé des techniques originales. Les analyseurs de COT InnovOx du premier repose sur la technique propriétaire d'oxydation de l'eau en phase supercritique ( Supercritical Water Oxidation ou SCWO). « L'échantillon de fluide est mis en phase supercritique dans un réacteur chauffé à + 375 °C et sous une pression de 225 bar. Il est alors possible d'atteindre une efficacité d'oxydation de 99 %,d'où une résolution et une précision de mesure meilleures », explique Fabienne Tissandier (GE Analytical Instruments France). Pour ses autres modèles en ligne, la société a par ailleurs remplacé le détecteur NDIR par une méthode de mesure de conductivité par membrane qui permet de descendre jusqu'au ppt (partie par milliard).

L'Exera a mené une campagne d'essais

«La question est apparue il y a deux, trois ans suite au renforcement des réglementations qui poussent notamment les industriels à se poser des questions sur la mesure du COT [Carbone organique total, NDLR] avant les rejets.Comme le dernier inventaire remontait à une dizaine d'années,nous avons décidé de le mettre à jour », rappelle Jacques Lachenal, animateur-secrétaire de la commission Pollution Eaux Analyse de l'association Exera). C'est ainsi que l'association a mené l'année dernière une campagne d'essais portant sur quatre analyseurs de COT en ligne, deux modèles à oxydation thermique et deux à oxydation chimique ou à froid ( voir article ci-contre ), certains appareils analysant également la concentration en azote total. Les essais ont été réalisés en laboratoire, pour l'évaluation des performances métrologiques et leur évolution, et sur le terrain. «Globalement,les quatre analyseurs testés fournissent des résultats à peu près identiques en laboratoire, c'est-à-diresur des échantillons connus et des matrices propres.Les écarts viennent surtout de problèmes de réglage au niveau des réactifs, des temps de réponse.Pour les essais sur le terrain, nous sommes plus circonspects car les résultats ont mis en évidence des variations non négligeables », annonce en avant-première Jacques Lachenal. En présence d'une eau chargée, par exemple, sont apparus des problèmes de broyage et de filtration afin que l'échantillon reste représentatif, et d'optimisation des réglages de l'appareil. «Sur le terrain, il n'est pas possible de maîtriser tout ce qui entoure la partie analytique, contrairement au laboratoire. La mise en place d'un analyseur de COT requiert donc un travail important de réflexion et de préparation pour prendre en compte les variations de matrice dans le temps… », ajoute-t-il. L'Exera finalise actuellement le rapport et envisage une publication officielle des résultats dans le courant de l'année 2014.

Quant à Hach Lange, la société a développé la technologie brevetée d'oxydation à deux niveaux ( Two Stage Advanced Oxidation ouTSAO). L'analyseur deTOC BioTector B7000 fait en fait intervenir une injection d'ozone dans un environnement très basique, d'où la création d'ions OH - très oxydants. Cette oxydation puissante est insensible à la présence de sels (teneurs jusqu'à 30 %) et accepte la présence d'huile, de matières grasses, de carburants, de particules jusqu'à une taille de 2mm, etc. dans les échantillons. En plus de l'absence de filtration en amont, une visite tous les six mois suffit pour la maintenance (tous les 60 à 90 jours pour changer les réactifs).

A côté de tous ces modèles mettant en œuvre une oxydation, les utilisateurs ont également le choix de systèmes d'analyse de COT en ligne par l'intermédiaire d'une mesure optique. « Le principe du capteur MemosensViomax CAS51D repose une mesure de l'absorbance de la matière organique,à une longueur d'onde de 254 nm.Les mesures permettent de déterminer la valeur de DCO [Demande chimique en oxygène, NDLR; voir encadré page 27 ] ,via des tables de corrélation, ou de COT », précise Matthieu Bauer, chef de marché Environnement chez Endress+Hauser France. Si elles ne sont pas aussi répandues pour la mesure des paramètres physico-chimiques que dans le domaine de l'analyse des gaz, par exemple, c'est que les méthodes optiques ne permettent pas de «voir»toutes les matrices (sucre, solvants, acides organiques, glycol…). Evidemment, les molécules recherchées doivent absorber à la longueur d'onde UV. Mais ces analyseurs sont très bien adaptés aux applications de surveillance. « Il est vrai que la méthode spectrométrique permet de s'affranchir de l'utilisation de réactifs, de réaliser des mesures in situ avec une mise en œuvre facile et un temps de réaction très rapide. L'autre inconvénient majeur réside dans le fait que la corrélation entre absorbance UV et concentration peut être vraie un jour mais ne plus l'être le lendemain, car la source de pollution a changé dans l'intervalle. En tant que constructeur, il faut être capable de proposer le bon appareil pour la bonne application », poursuit Matthieu Bauer.

Des « astuces » pour simplifier encore la vie des opérateurs

Les évolutions dont ont bénéficié ces dernières années les analyseurs de COT ne revêtent pas toujours le développement de nouvelles techniques d'oxydation et/ou de mesure. Il peut s'agir plus souvent d'améliorations plus «anodines» mais qui apportent des bénéfices significatifs aux opérateurs en termes de maintenance et d'utilisation. « Nos clients apprécient par exemple la possibilité de passer un échantillon manuel en remplissant une bouteille et en l'installant aussi simplement à une entrée dédiée du COTmètre en ligne. Certains sites ne peuvent en effet pas investir dans plusieurs analyseurs mais pas non plus attendre une semaine que la mesure soit fait en laboratoire », constate Guillaume Schneider (Swan Instruments analytiques France). La société a également ajouté à son modèle une vanne de contrepression en entrée, en option, pour réduire la pression de 6,5 à 0,5 bar (et sans devoir requalifier l'analyseur contrairement à une vanne externe). Autre «petit plus», la présence d'une entrée «eau chaude» évite de recourir à toutes sortes d'artifices (serpentins…) pour abaisser la température.

Comme n'importe quel autre appareil de mesure, les COTmètres bénéficient eux aussi des évolutions en termes d'électronique et d'informatique. Les nouvelles interfaces homme-machine, la connectivité réseau, etc. Les appareils deviennent ainsi plus conviviaux pour des utilisateurs moins spécialisés, plus sécurisés du point de vue des communications.

GE Analytical Instruments

Endress+Hauser a, quant à lui, installé un piège à sels sur son modèle à four, ce qui permet de réduire les interventions de maintenance et aussi d'éviter un temps de chauffe supplémentaire. Christophe Vaysse (Anael) rappelle une nouvelle fois que « la prise d'échantillon est très importante et qu'une eau bien “préparée” en amont, à savoir en température, en pression,en débit,sans particules en suspension,etc., peut être complexe à réaliser.» Que les industriels ne soient pas (trop) effrayés par cette insistance des fabricants car ces derniers proposent souvent des solutions à façon. Et Jacques Lachenal (Exera) va même plus loin: « Les analyseurs de COT en ligne doivent être bien vendus, les technico-commerciaux doivent proposer l'appareil le mieux adapté à l'application, ce qui passe notamment par la qualité du traitement de l'échantillon.»

Pour Philippe Dufeutrelle, président de Seres Environnement, « nos produits sont constamment mis à jour, poussé en cela par les clients, en termes informatique,avec une nouvelle version logicielle par exemple, et électronique (cartes, IHM [Interface homme machine, NDLR] , connectivité réseau…).» Ce que confirment d'autres fournisseurs: « S'il n'y a pas vraiment d'évolutions en termes d'analyse, ce n'est pas le cas en ce qui concerne la gestion de l'appareil.Cela se traduit par des logiciels plus conviviaux, des analyseurs plus sécurisés du point de vue des communications avec le remplacement de la sortie analogique par une interface TCP/IP, etc. La conception du QuickTOCultra a d'ailleurs été repensée en prenant en compte une communication numérique entre les différents éléments », explique Christophe Vaysse (Anael). Il s'agit par ailleurs de répondre aux demandes des clients au niveau de l'amélioration de la prise en main des COTmètres. « Il faut prendre en compte la complexité des taches que les opérateurs internes ou externes doivent réaliser. D'où la présence d'interfaces didactiques et claires, d'un seul logiciel uniformisé pour l'intégration de multiples capteurs, etc.», ajoute Philippe Dejour (Mettler-Toledo Analyse industrielle France). D'autant que les personnes qui interviennent sur les analyseurs de COT en ligne sont de moins en moins nombreuses et plus forcément compétentes dans tous les domaines.

En plus de nouvelles méthodes de mesure, les fabricants ont également porté leur développement sur des petits «plus » (possibilité de passer un échantillon manuel, présence d'une entrée «eau chaude », un piège à sels en entrée de four…), mais qui apportent des bénéfices significatifs ux opérateurs en termes de maintenance et d'utilisation.

Swan Instruments analytiques

Les exigences des industriels ne tournent pas uniquement autour de la maintenance et de l'utilisation des COTmètres en ligne. Dans le cas des secteurs de la pharmaceutique et de l'agroalimentaire, notamment, l'une des préoccupations majeures de ces industriels porte actuellement sur le contrôle des pertes matières. La fabrication de médicaments ou de produits alimentaires peut en effet faire intervenir, même en quantité infinitésimale pour chaque médicament ou aliment, des matières premières très onéreuses dont les industriels cherchent à optimiser au maximum les volumes. Et cette tendance s'est significativement accentuée avec le contexte économique difficile actuel…

Les industriels se préoccupent des pertes matières

« En agroalimentaire, les matières premières représentent le plus gros budget, à savoir 60 à 80 % du prix du lait. On peut donc facilement imaginer les gains si l'on optimise les coûts. Et l'on ne peut pas contrôler quelque chose si l'on ne dispose pas de mesure comme c'était le cas auparavant », constate Christian Collet (Hach Lange France). Et de Matthieu Bauer (Endress+Hauser France) d'ajouter : « En plus de la hausse du coût des matières, détecter une éventuelle perte de matière avant que celle-ci ne vienne polluer la production,et donc entraîner des coûts d'exploitation plus élevés, justifie très facilement l'investissement d'un analyseur de COT en ligne.»

Le contrôle des pertes matières n'est qu'un aspect du rôle que peuvent jouer les analyseurs de COT en ligne au niveau des procédés. « S'ils achètent un appareil pour la surveillance de leurs rejets et qu'en plus il leur permet de réellement réaliser des économies financières au niveau du process, c'est ce qu'un bon nombre de clients recherchent », constate Philippe Dufeutrelle (Seres Environnement). Ils peuvent par ailleurs mieux optimiser le fonctionnement de leur station de traitement des rejets et éviter de se retrouver à devoir limiter, voire arrêter, leur production pour ne pas dépasser la capacité de la station d'épuration ou les seuils limites autorisés. Dans l'industrie pharmaceutique, cette notion de pilotage à partir des valeurs de COT n'est pas encore tout à fait répandue, mais certains industriels réfléchissent à libérer en temps réel un lot de médicaments, comme cela se fait avec la mesure de conductivité, ou encore l'eau ultrapure. N'oublions pas qu'il faut compter une durée de huit heures entre le prélèvement et l'analyse contre une dizaine de minutes avec un COTmètre en ligne. Imaginez les rendements de production que l'on pourrait ainsi atteindre…

Les industries pharmaceutiques et agroalimentaires ne sont pas les seules à être intéressées. « Des choses vont se faire à terme dans le secteur des chaudières pour le suivi de la qualité de l'eau déminéralisée,par exemple.Le fonctionnement 24 h/24 d'un osmoseur est très coûteux et il serait pertinent d'utiliser la teneur en COT pour piloter l'osmoseur et ainsi économiser la durée de vie des membranes », poursuit Guillaume Schneider (Swan Instruments analytiques France). Mais, pour faire changer les mentalités, il faut disposer au moins d'un point de mesure (et d'un appareil fiable de préférence) qui permet alors à l'industriel d'identifier les problèmes tels que les dépassements de cuve, etc. Dans le cas contraire, ils ont plutôt tendance à continuer à (mal) produire, du moment que la production tourne.

Certains industriels mettent en œuvre une mesure de COT ligne afin de contrôler les pertes matières, d'où des gains économiques significatifs. Le contrôle de ce paramètre peut également servir dans l'optimisation des procédés, le bon fonctionnement de la station de traitement des rejets…

Seres Envirronnement

Même si les prix d'achat des analyseurs de COT en ligne ont chuté ces dernières années –il faut encore débourser de l'ordre de 10000 à 15000 euros/(méthodes à froid) et à partir de 20000 euros pour les oxydations thermiques, sans compter les coûts de maintenance–, la généralisation des points de mesure de COT en ligne au-delà de la boucle critique du process n'est pas encore pour demain, en raison des phases de décision encore longues vu l'investissement à faire et du temps qu'il a fallu aux sondes de conductivité pour se démocratiser (une vingtaine d'années). Qui sait si les exigences réglementaires ne vont pas accélérer le mouvement…

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