«La directive ATEX 2014/34/UEpermettra acteurséconomiques» deresponsabilisertousles

Le 01/10/2015 à 0:00

Mesures. Pouvez-vous rappeler en quelques mots ce que sont la directive ATEX et ses précédentes évolutions?

Thierry Houeix. La directive 94/9/CE a été publiée en 1994 et elle est d'application obligatoire depuis le 1 er juillet 2003. En tant que directive «Nouvelle approche», elle participe à l'harmonisation des exigences essentielles uniquement, à l'élaboration des spécifications techniques par la normalisation et au maintien du statut volontaire des normes, ainsi qu'à la présomption de conformité. La directive 94/9/CE, qui a été transposée en droit national pour être applicable, est d'harmonisation totale et implique le marquage CE. Elle est applicable jusqu'au 19 avril 2016…

Mesures. Précisément, l'Union européenne a décidé de faire évoluer la directive et,à cette date,une nouvelle devra être appliquée. Quelles sont les principales différences entre les deux directives?

Thierry Houeix. L'un des points importants de la nouvelle directive ATEX 2014/34/EU – dont le texte a été approuvé le 5 février 2014 par le Parlement européen et qui a été publié le 29 mars de la même année– portera sur le fait qu'elle sera d'application à compter du 20 avril 2016. Dès le 20 avril 2016, la directive 94/9/CE ne sera plus applicable pour déclarer un nouveau produit ATEX. Par contre, un produit qui aurait été mis sur le marché avant cette date restera conforme à la directive 94/9/CE. Comme il peut y avoir un certain temps entre le moment de la mise sur le marché et l'arrivée chez un utilisateur (six mois voire un an parfois), on se retrouvera alors avec des produits ATEX conformes à l'ancienne directive et d'autres produits ATEX conformes, eux, à la nouvelle directive. En ce qui concerne les évolutions, je vous dirais qu'il n'y a aucun changement entre les deux directives du point de vue technique. Ce qui change est en fait principalement la manière de notifier les organismes. Ils devront en effet être accrédités avant d'être notifiés par l'Etat membre. Un autre changement porte ensuite sur la mise en œuvre des relations entre les Etats membres, en particulier vis-à-vis de la surveillance du marché, et quelque part, des autres acteurs. Un grand changement est une responsabilisation de l'ensemble des acteurs économiques jouant un rôle dans la mise sur le marché des produits ATEX.

Le texte a été transposé en droit français, par le décret n°2015-799 du 1 er juillet 2015.

Mesures.Qu'entendez-vouspar«l'en-semble des acteurs économiques» ?

Thierry Houeix. Il ne s'agit pas seulement des fabricants, des représentants autorisés et des mandataires, comme cela était le cas jusque-là dans la directive 94/9/CE, mais de toute la chaîne de distribution et donc des distributeurs et revendeurs de produits ATEX. Ils ont maintenant une part de responsabilité dans la vente d'un équipement ATEX. Concrètement, s'ils veulent commercialiser un tel produit, ils doivent s'assurer qu'il répond à la réglementation relative aux appareils et aux systèmes de protection destinés à être utilisés en atmosphères explosibles. Un produit ATEX doit être déjà déclaré conforme et il est demandé qu'il soit également marqué ATEX sur le produit, qu'il soit livré par exemple avec une déclaration CE de conformité ou, à partir du 20 avril 2016, une déclaration UE.

Thierry Houeix, délégué « Certification » et référent technique ATEX et IECEx au sein de la Direction de la certification à l'Ineris

Thierry Houeix a rejoint le Service électrique de sécurité et de certification de l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) en 1995. Douze ans après, il rejoint la Direction de certification de l'institut puis devient délégué Certification et référent technique de tous les Schémas de certification Ex (ATEX, IECEx, Saqr-ATEX et Ism-ATEX).

Thierry Houeix a notamment en charge le suivi de la directive ATEX, du système IECEx, de la normalisation Ex et des relations avec les laboratoires d'essais et les organismes de certification internationaux. Il est par ailleurs vice-président du groupe des Organismes notifiés (ExNB) depuis sept ans.

Concernant la normalisation, il est président du comité technique UF31 français et membre du TC31 de l'International Electrotechnical Commission (IEC). Il était également le chef de projet de la première norme ISO/IEC dans le domaine atmosphère explosive, l'ISO/IEC 80079-34 traitant le Système de qualité pour la fabrication Ex de matériel. En 2011, il a d'ailleurs reçu pour ce travail l'IEC 1906 Award.

Ineris

Thierry Houeix est aujourd'hui responsable de la future norme ISO concernant le s appareils non électriques. Concernant le Système IECEx, il est devenu en 2011 auditeur principal IECEx pour l'ensemble des quatre schémas et, au 1 er janvier de cette année, membre du comité directeur de l'IECEx en tant que trésorier.

Mesures.Quelle est la différence entre les deux déclarations?

Thierry Houeix. Jusqu'à il y a encore quelques années, il s'agissait d'une déclaration CE par rapport aux réglementations en vigueur. Depuis 2010, nous sommes dans l'Union euro-péenne et donc toutes les réglementations sont devenues UE. Le marquage CE qui signifie conformité européenne, lui, ne change pas, il y en a toujours un. Mais la déclaration est une déclaration UE pour Union européenne. Si l'on regarde les éventuelles différences, je dirai que, là aussi, il n'y a techniquement rien qui change pour le fabricant, puisque la directive 94/9/CE est une directive « Nouvelle approche ». Pour satisfaire aux exigences essentielles, le fabricant peut se servir de normes harmonisées qui le seront également par rapport à la directive 2014/34/UE. Ce qui est sûr, c'est que, du jour au lendemain, entre le 19 avril et le 20 avril 2016, le fabri-cant va devoir changer sa déclaration pour être conforme à la réglementation européenne. Une période transitoire est normalement demandée, mais la Commission européenne a défini qu'il n'y aurait pas besoin puisque, effectivement, il n'y a aucun changement. Pour résumer, ce n'est donc qu'une affaire de déclaration. Un fabricant pourrait déclarer la conformité de son produit aux deux directives, mais, dans les faits, cela n'est pas possible –une seule directive est applicable à un moment donné. De nombreuses questions complémentaires restent donc sans réponses, questions que l'ensemble des parties prenantes, en particulier les fabricants a d'ailleurs posées, au travers du Comité de liaison des équipements ATEX (CLATEX) en France. Nous avons également reposé ces questions lors du workshop organisé le 30 septembre dernier au niveau européen, pour obtenir des réponses susceptibles d'aider les fabricants à savoir ce qu'ils vont pouvoir faire l'année prochaine : vont-ils pouvoir disposer de deux déclarations dans leur package , déclarant la conformité à la directive 94/9/CE jusqu'au 19 avril puis à la directive 2014/34/UE après cette date ? Officiellement, ils devraient changer l'ensemble de leurs déclarations CE par des déclarations UE, dans la nuit du 19 au 20 avril. On sait pertinemment que cela n'est pas réalisable et il va falloir qu'il y ait une certaine tolérance…

En responsabilisant l'ensemble des acteurs économiques, il sera possible de verbaliser ceux qui ne respecteraient pas la réglementation. Aujourd'hui, une société qui commercialise un produit ATEX sans être sûr et certain que le produit soit bien conforme n'encourt aucune sanction pénale… mis à part le fait de se voir signifier qu'elle a mal agi.

Fluke

Nouvelles définitions introduites par la directive 2014/34/UE

l Mise à disposition sur le marché: toute fourniture d'un produit destiné à être distribué, consommé ou utilisé sur le marché de l'Union européenne dans le cadre d'une activité commerciale, à titre onéreux ou gratuit

l Mise sur le marché: la première mise à disposition d'un produit sur le marché de l'Union européenne

l Fabricant: toute personne physique ou morale qui fabrique un produit, ou fait concevoir ou fabriquer un produit, et qui commercialise celui-ci sous son nom ou sa marque

l Mandataire: toute personne physique ou morale établie dans l'Union européenne ayant reçu mandat écrit du fabricant pour agir en son nom aux fins de l'accomplissement de tâches déterminées

l Importateur: toute personne physique ou morale établie dans l'Union européenne qui met un produit provenant d'un pays tiers sur le marché de l'Union européenne

l Distributeur: toute personne physique ou morale faisant partie de la chaîne d'approvisionnement, autre que le fabricant ou l'importateur, qui met un produit à disposition sur le marché

l Opérateurs économiques: le fabricant, le mandataire, l'importateur et le distributeur

l Spécification technique: un document qui établit les exigences techniques auxquelles un produit, processus ou service doit répondre

l Accréditation: l'accréditation au sens de l'article 2, point 10, du règlement (CE) n° 765/2008

l Evaluation de la conformité: le processus qui permet de démontrer si les exigences essentielles de sécurité et de santé relatives à un produit, processus, service ou système ont ou non été respectées

l Organisme d'évaluation de la conformité: un organisme qui procède à des activités d'évaluation de la conformité, y compris l'étalonnage, les essais, la certification et l'inspection

l Rappel: toute mesure visant à obtenir le retour d'un produit qui a déjà été mis à la disposition de l'utilisateur final

l Retrait: toute mesure visant à empêcher la mise à disposition sur le marché d'un produit de la chaîne d'approvisionnement

l Marquage CE: le marquage par lequel le fabricant indique que le produit est conforme aux dispositions applicables énoncées dans la législation d'harmonisation de l'Union européenne prévoyant son apposition

Mesures. Pourquoi, à quelque six mois de l'échéance,existe-t-il encore un tel flou?

Thierry Houeix. Le flou vient justement du fait qu'il n'y a pas de raison d'avoir une période transitoire comme il a pu y en avoir avec la directive 94/9/CE. Elle a été transposée en droit français en 1997 et les fabricants avaient jusqu'au 1 er juillet 2003 pour se conformer totalement à la directive.

Mesures. Si je vous comprends bien, à partir du 20 avril 2016, on trouvera des produits conformes à différentes directives, parce que la directive 2014/34/UE ne sera appliquée qu'aux nouveaux produits…

Thierry Houeix. Qu'aux produits nouvellement mis sur le marché. Par contre, sur le marché, on pourra effectivement trouver des produits conformes à l'une ou à l'autre directive. Et un industriel lambda n'aura normalement aucun problème pour utiliser un produit ou un autre. Il est d'ailleurs précisé dans la directive 2014/34/UE que tous les produits conformes à la directive 94/9/CE, du moment qu'ils ont été mis sur le marché avant le 20 avril, le seront toujours après. Je reconnais que cela ne va pas forcément être très simple pour les utilisateurs, mais, en communiquant sur l'absence de changements techniques, on comprend bien mieux qu'un produit ATEX «94/9/CE» ne diffère pas d'un produit ATEX «2014/34/UE». Il est vrai que la commission aurait très bien pu ne pas changer de référence et faire une révision, cela aurait été plus simple. Mais, à cause de l'évolution de la Communauté européenne en Union européenne, cela aurait posé des problèmes : en 1994, nous n'étions pas encore dans l'Union européenne, d'où

l'impossibilité de définir une directive 94/9/CE en UE. La directiveATEX n'est toutefois pas la seule à changer le 20 avril 2016, il y a neuf autres directives qui seront alignées en accord avec le nouveau cadre législatif européen ( New Legislative Framework - Decision 768/2008/EC) .

Mesures. A l'image de la directive 94/9/CE, la nouvelle directive ATEX doit être, elle aussi, transposée en droit français. Est-ce que cela a déjà été fait?

Thierry Houeix. Oui, le texte a été transposé en droit français le 1 er juillet dernier.

Mesures. La période de transition entre le 29 mars 2014, date de la publication de la nouvelle directive,et le 19 avril 2016 est donc uniquement pour permettre la transposition en droit national…

Thierry Houeix. Exactement. Chaque Etat membre a l'obligation d'avoir transposé en droit national la directive avant le 19 avril 2016. En France, cette transposition a pris la forme d'un décret, le décret n°2015-799. D'ici le 19 avril 2016, les Etats devront également notifier les organismes reconnus compétents vis-à-vis de la directive 2014/34/UE.

Mesures.Vous disiez en début d'interview que l'un des changements de la nouvelle directive porte sur la manière de notifier les organismes. Sur quoi portent ces changements?

Thierry Houeix. Du fait qu'ils vont devoir être accrédités, on peut raisonnablement estimer que les organismes notifiés seront plus compétents. Mais nous savons que tout va dépendre en fait des organismes d'accréditation –pour la France, l'organisme accréditeur sera le comité d'accréditation (Cofrac). Ces derniers devront en effet s'assurer, préalablement à une notification par l'Etat membre,que l'organisme est compétent techniquement via une accréditation.

Mesures. Connaît-on déjà des organismes notifiés français?

Thierry Houeix. Oui,nous les connaissons. Il s'agit de l'Ineris et du LCIE (le Laboratoire central des industries électriques ou LCIE BureauVeritas, ndlr).

Mesures. En plus de l'accréditation des organismes notifiés, vous évoquiez également la responsabilisation des acteurs économiques. Pouvezvous préciser votre pensée?

Thierry Houeix. Le second grand changement de la nouvelle directive est, comme je l'ai évoqué auparavant, de responsabiliser l'ensemble des acteurs économiques. En les responsabilisant, il sera également possible de verbaliser les acteurs économiques qui ne respecteront pas la réglementation.Aujourd'hui, une société qui commercialise un produitATEX sans être sûre et certaine qu'il soit conforme n'encourt aucune sanction pénale… mis à part le fait de se voir signifier qu'elle a mal agi.A moins, bien sûr, que le produit soit à l'origine d'une explosion, mais là, la situation est différente. Sans aller jusqu'à ces extrêmes, les utilisateurs peuvent être confrontés à des non-conformités sur des produits arrivant sur le marché européen via un achat en ligne, et donc sans avoir été contrôlés par qui que ce soit. Le problème, dans ce cas de figure, est qu'il n'existe pas un importateur officiel qui serait alors juridiquement responsable. Le circuit de vente passe par des distributeurs. Sont-ils alors conscients d'être les importateurs? Ce n'est pas certain…

La réglementation concernant les atmosphères explosibles, et en particulier la directive européenne 94/9/CE, dite directive ATEX, est une composante essentielle pour un grand nombre d'industries. Elle s'applique aux équipements destinés à être utilisés en zones explosibles, ce qui touche aux aspects de sécurité des biens et des personnes.

Cas concret: installation d'une soupape et d'un RBS motorisé sur une cuve ATEX

l Prenons l'exemple d'un chaudronnier qui souhaite installer sur une cuve ATEX une soupape et un RBS motorisé. Son distributeur approvisionne la soupape, un système de borication de sécurité (RBS) importé, un moteur électrique, une arcade et un manchon d'accouplement. Si les différents éléments sont bien ATEX, qu'en est-il de l'assemblage?

De quoi doit s'assurer le distributeur (et l'assembleur dans ce cas de figure)? De quelles qualifications, de quels agréments, etc. a-t-il besoin? Quels documents doit-il ou peut-il délivrer, conserver…?

l Le distributeur doit s'assurer que l'assemblage est bien conforme à la directive ATEX 94/9/CE (marquage, déclaration CE de conformité, notice d'instructions). L'assembleur, lui, doit vérifier que l'assemblage qu'il constitue est bien conforme aux exigences essentielles de la directive (évaluation des risques et conformité aux normes de conception, rédaction d'un dossier technique de preuve de la conformité de l'assemblage, rédaction d'une notice d'instruction contenant les notices de tous les appareils constituant l'assemblage, rédaction d'une déclaration CE de conformité et marquage de l'assemblage conformément à la directive 94/9/CE).

l Le distributeur et l'assembleur n'ont besoin d'aucun agrément, qualification, autorisation, certification, etc. en particulier. Si ce n'est une compétence réglementaire et technique afin de mener à bien les tâches et les obligations qui leur incombent.

l L'assembleur doit délivrer et conserver l'ensemble des documents qui doivent être délivrés et conservés aussi par le fabricant, et cela pendant une période de dix ans (dossier technique de preuve de la conformité [non délivré], notice d'instruction, déclaration CE de conformité). Quant au distributeur, il doit délivrer et conserver les documents tels que la notice d'instruction et la déclaration CE de conformité.

Mesures. Pour conclure, quels sont, plus généralement, les travaux en cours au niveau de l'ATEX?

Thierry Houeix. L'un de ces travaux, qui a d'ailleurs été présenté le 30 sep-tembre dernier, est le nouveau guide ATEX, contenant les lignes directrices qui permettent d'interpréter ou de mieux comprendre la directive ATEX. Ces nouvelles lignes directrices sont basées sur le format des lignes directrices de la directive machine.

Mesures. Pourquoi avez-vous choisi d'utiliser la directive machine comme modèle?

Thierry Houeix. Si vous reprenez les lignes directrices de la directive ATEX 94/9/CE, elles sont totalement indépendantes du corps de la directive ellemême. Il a alors été décidé qu'il était plus clair d'avoir des lignes directrices reprenant le corps du texte de la directive et donnant exactement, pour chaque article, l'interprétation communément admise par l'ensemble des Etats membres.Le format avait été adopté par les personnes en charge de la rédaction des lignes directrices de la directive machine, parce qu'il est le plus facilement lisible par tout un chacun. D'où la prise en considération pour la nouvelle directiveATEX. La lecture du guide devrait donc être plus simple qu'auparavant. Du moins, c'est ce que nous

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