Les logiciels MES et MOM

Le 28/01/2019 à 13:30

Les logiciels MES sont souvent décrits comme les « chefs d'orchestre » de l'usine. À l'heure de l'industrie 4.0, les éditeurs gardent ce cap: « Le MES reste au cœur du système industriel , indique Nicolas Stori, PDG d'Astrée Software. Sa position d'outil central est confortée par ses connexions avec l'ensemble des composantes de l'usine du futur .» Les MES doivent aujourd'hui être capables de se connecter aux équipements de production, comme aux autres logiciels spécialisés. « La couverture fonctionnelle reste la même, ajoute Sylvie Castagnéris-Nambotin, responsable des grands comptes chez Infodream. Mais l'industrie 4.0 met à notre disposition une multitude de nouveaux outils, avec lesquels nous allons être amenés à travailler ».

Les 11 fonctions du MES

On attribue généralement 11 fonctions aux logiciels MES. Tous ne proposent pas l'ensemble de ces fonctions, mais cette liste, issue de la norme ISA-95, reste citée comme référence.

l Acquisition des données: collecter les informations brutes relatives à la production, de façon manuelle ou automatisée.

l Ordonnancement: donner une vue d'ensemble des commandes et des opérations à effectuer.

l Gestion du personnel: suivre et coordonner les équipes, prendre en compte les compétences et les habilitations des opérateurs.

l Gestion des ressources: suivre et optimiser les ressources (machines, outils, matières…) et leur utilisation.

l Cheminement des produits et des lots: gérer les flux, transmettre et recevoir les informations vers l'ERP ou les postes de travail.

l Traçabilité du produit et généalogie: connaître les informations relatives à une pièce ou à un lot (composition, matières premières, numéros de série, conditions de production…).

l Contrôle de la qualité: analyser la qualité, réagir en cas de problème.

l Gestion des procédés: suivre et optimiser la production par le pilotage, la gestion des alarmes.

l Analyse des performances: fournir des informations pertinentes sur la production, les contextualiser.

l Gestion des documents: mettre à disposition des opérateurs les documents nécessaires (recettes, instructions…).

l Gestion de la maintenance: optimiser la disponibilité des outils de production par la planification de la maintenance.

Pour parler de MES, on considère qu'un logiciel doit couvrir les onze fonctions ( voir encadré ci-dessous ) définies par le MESA. Il s'agit d'une association internationale travaillant sur l'amélioration des performances opérationnelles, via la mise en place de solutions technologiques et de règles de bonnes pratiques. « Les fonctions peuvent être rangées en quatre groupes : la gestion de la production,de l'inventaire, de la qualité et de la maintenance, c ommente Jérôme Pasteur, responsable du département Conseil pour le groupe SPC. Le concept a peu évolué, mais on parle aujourd'hui de MOM, pour Manufacturing Operation Management (gestion des opérations de production).C'est une approche plus orientée métier ».

« On ne produit pas la même chose en pharmacie, en agroalimentaire ou dans l'aéronautique, précise Thomas Nouge-Berde, expert MES chez Siemens. Chaque secteur a ses contraintes propres.En parlant de MOM, on va plutôt réfléchir par industrie. » En effet, bien que certains besoins soient transversaux, des notions comme la qualité varient grandement selon le produit, ou les normes en vigueur. « Dans le domaine médical, les normes FDA sont extrêmement drastiques, ce qui contraint énormément la production », continue Thomas Nouge-Berde. Les process et les machines varient eux aussi beaucoup, selon que l'on parle, par exemple, d'assembler des pièces ou de mélanger des ingrédients. Les fonctions traditionnelles du MES ne s'appliquent donc pas de la même façon.





En contextualisant les données de production, les MES ont vocation à guider la démarche d'amélioration continue, grâce à des informations pertinentes.

Astrée Software

« Le terme de MOM concerne surtout de gros éditeurs, comme Wonderware (Schneider Electric),Siemens ou Dassault Systèmes, analyse Jérôme Pasteur (SPC). Ce sont des solutions capables de gérer, en plus de la production, des ordres de transfert, de qualité, ou de travaux de maintenance. Ils se positionnent sur des projets souvent plus coûteux que les MES plus simples ».

Les MES ne proposent pas qu'une somme de fonctions. Les systèmes d'information industriels « ont longtemps été pensés selon une approche monolithique, rappelleThomas Nouge-Berde (Siemens). On cherchait une solution pour chaque besoin. Cela engendrait un système très hétérogène, et l'on ne tirait pas toute la quintessence des informations recueillies. » Cette démarche implique la création de nombreuses interfaces, potentiellement coûteuses, entre les différents systèmes. De plus, elle prive les informations de leur contexte: équipe, machine utilisée, type de pièce produite… Cela limite les investigations. Un MES, en revanche, doit permettre d'enrichir les données avec des informations de contexte, de tisser des liens entre elles, de les examiner selon l'angle le plus pertinent pour résoudre un problème particulier.

Comprendre les problèmes

« On réduit encore trop souvent le MES au suivi de performances et au calcul de TRS (taux de rendement synthétique), déplore Lionnel Monnier, responsable commercial chez l'éditeur et intégrateur OET. Si leTRS est souvent un angle d'attaque,il ne faut pas limiter le projet à cela. » En contextualisant les informations, on peut aller plus loin dans l'analyse. Les taux de pannes anormaux ou les goulets d'étranglement ont des causes qu'il faut identifier. Pour certains process, par exemple, la température extérieure a un effet sur la qualité du produit. On peut alors faire en sorte que les machines se règlent de façon automatique selon ce paramètre. Si le nombre de rebuts augmente à la suite d'un changement de fournisseur, on pourra comprendre pourquoi, et prendre les bonnes décisions pour adapter le process au changement de la matière première.

« C'est une grosse évolution pour notre solution MES : nous travaillons maintenant dans un objectif d'amélioration continue, ajoute Nicolas Stori (Astrée Software). Il faut en effet aider concrètement le personnel de terrain, car ce sont eux qui peuvent faire progresser la production. » Cela passe par des tableaux de bord pertinents en temps réel, des plannings prenant en compte les encours, la qualité ou la vitesse de production. Cela permet une planification pertinente de la maintenance préventive, de comparer les performances réelles du système avec les temps théoriques pour affiner les informations, et finalement fournir des délais fiables.

Au sein du système d'information, les MES peuvent être concurrencés par d'autres logiciels. Les éditeurs d'ERP, notamment, ont tendance à élargir leurs fonctions, en incluant certaines habituellement réservées au MES. « Certains ERP veulent faire du suivi de production dans l'atelier, relève Lionel Monnier (OET). Mais cette démarche ades limites.En effet,les gammes et nomenclatures créées dans l'ERP ne sont pas forcément les mêmes que celles utilisées dans l'atelier. » L'ERP peut ainsi proposer un niveau de détail différent, mais insuffisant. « Pour une recette de pâte à crêpes, on peut avoir les grandes lignes, comme la quantité de farine, mais cela ne suffit pas, illustre Lionel Monnier. Le MES, lui, doit donner plus d'informations sur la façon d'incorporer les ingrédients ».









Des logiciels complémentaires

Utiliser un système manquant de précision impose aux agents de production de créer et d'utiliser des fichiers annexes avec les informations nécessaires. De plus, les logiciels ERP ne sont initialement pas conçus pour se connecter directement aux équipements de production, ou pour afficher des informations en temps réel. Attention, donc, à ne pas utiliser un outil logiciel en dehors du périmètre pour lequel il est optimisé. De même,certains logiciels de supervision peuvent proposer des fonctions similaires aux MES, comme le calcul deTRS. Si cela peut s'avérer utile, le risque est de se voir obligé d'effectuer par la suite des développements spécifiques pour obtenir de nouvelles fonctions, là où un MES est conçu avec un périmètre d'applications plus large. Ces différents systèmes, MES, ERP ou supervision, ont plutôt vocation à être complémentaires. Cela impose de mettre en place les interfaces adéquates. De même,les éditeurs de MES conseillent de laisser les logiciels spécialisés existants faire leur travail, dans la mesure où ceux-ci sont efficaces. « Lorsque l'on a de très bons outils métiers,il faut savoir laisser la main à ces logiciels et assurer la continuité du système d'information », plaide Sylvie Castagnéris-Nambotin (Infodream). Mais quelles contraintes imposent les interfaces? « La compatibilité va en s'améliorant, rassure Sylvie Castagnéris-Nambotin. Tous les éditeurs ont intérêt à avoir des API, ou à travailler par des services web ».





Mener à bien un projet de MES implique souvent de commencer par l'installation d'une fonction représentative de la production. L'application pourra être ensuite étendue, une fois les premiers gains réalisés.

Infodream

Outre les logiciels, les MES doivent aussi s'interfacer avec les outils de production, qui peuvent également être très hétérogènes. Les fabricants d'automatismes, qui éditent eux aussi des logiciels MES, ont-ils un avantage de ce point de vue ? « Quoi qu'il arrive, nous devons être capables de nous interfacer avec tous types de systèmes, indiqueThomas Nouge-Berde (Siemens). Nous pouvons proposer des communications plus rapides ou plus sécurisées pour échanger avec nos propres équipements, mais nous devons nous adresser à l'ensemble de l'usine.» Les éditeurs de MES proposent des drivers pour différents types d'automates, « il n'est donc pas forcément utile d'utiliser un MES de Rockwell Automation si l'on utilise des automates de cette marque, confirme Jérôme Pasteur (SPC). Aujourd'hui, les échanges sont de plus en plus standardisés, le bus de terrain utilisé importe peu ».





Les fonctions des MES s'appliquent de façon très différentes selon les secteurs industriels. Certains éditeurs parlent donc de MOM pour désigner une approche plus orientée « métier ».

Siemens

La montée en puissance du protocole OPC UA ( Open Platform Communications Unified Architecture ) aide à cette démarche: « il existe de nombreux serveurs OPC sur le marché, observe Lionel Monnier (OET). Ils embarquent des drivers et permettent même de mettre en place des outils de cybersécurité, comme des pare-feu. » Pour autant, avec certains équipements, « il reste un vrai travail de normalisation à faire, estime Nicolas Stori (Astrée Software). Aujourd'hui,cela n'est pas encore très organisé.Mais,dans le cadre du Club MES, nous nous rapprochons d'autres acteurs de l'industrie du futur, comme des fabricants de composants, afin d'essayer d'aller vers un objectif commun ».

Les solutions MES sont nombreuses sur le marché, et le fait qu'elles couvrent des fonctions similaires peut rendre la comparaison difficile. Comment se différencient les acteurs de ce marché ? Tout d'abord, tous les MES ne remplissent pas toutes les fonctions traditionnelles. Certains se focalisent sur leurs points forts et peuvent être complétés par d'autres solutions spécialisées. Certains MES sont axés sur le suivi: à l'écoute des automatismes existants, ils s'interfacent généralement entre le SCADA et l'ERP. D'autres, en revanche, ont plus une vocation de pilotage. « Ils embarquent souvent la partie SCADA, le contrôle-commande et le lancement de cycles de production, commente Lionel Monnier (OET). On trouvera alors des paramètres de traçabilité automatiquement enregistrés et rattachés à l'ordre de fabrication. Ce sont des solutions très puissantes pour des lignes de production neuves. » Cela ne signifie pas qu'un type de MES est supérieur à un autre : tout dépend des objectifs de l'entreprise et de l'état de ses équipements.

Les limites de la pyramide du CIM

Les différents niveaux du système d'information industriel sont souvent représentés sous la forme d'une pyramide, dite de CIM ( Computer-Integrated Manufacturing, pour production intégrée par ordinateur), organisant différents niveaux de façon hiérarchique. On retrouve ainsi les capteurs au niveau 0, puis les automates, la supervision, le MES et, enfin, l'ERP au niveau 4. « Mais en réalité, on a plus affaire à un réseau,où tout discute avec tout », décrit Frédéric Henrionnet, responsable des grands comptes chez Infodream. Ainsi, si le MES peut effective-ment utiliser la couche SCADA comme un agrégateur de données, il peut aussi souvent aller chercher les informations directement à la source. « Il existe une telle hétérogénéité qu'il serait trop réducteur de poser les briques ainsi les unes sur les autres, ajoute Thomas Nouge-Berde, expert MES chez Siemens. Concrètement,aucune entreprise ne présente des couches définies exactement de cette façon. » Mais ce schéma a toutefois un intérêt: il permet d'illustrer la place du MES dans le système d'information, et de le différencier de la supervision et de l'ERP.

Prêt à l'emploi ou sur mesure

Ensuite, il existe des solutions packa-gées, qui n'ont besoin que d'êtrepara-métrées pour être prêtes à l'emploi. Souvent, celles-ci vont mieux convenir aux PME. Les grands groupes, eux, sont plus susceptibles d'être intéressés par des logiciels donnant une plus grande marge de manœuvre : des « boîtes à outils » permettant de construire une solution sur mesure. « Les PME ont les mêmes besoins que les grosses entreprises,mais ont une approche extrêmement pragmatique, observe Nicolas Stori (Astrée Software). Nous leur conseillons de déployer les fonctions une par une,tandis que les grandes entreprises développent souvent des pro-jets plus globaux. »

Certaines solutions sont très spéciali-sées et s'adressent à des secteurs professionnels précis, comme la transformation de céréales ou la plasturgie. Elles proposent des fonctions prêtes à l'emploi, permettant une mise en œuvre rapide. « Mais certaines entreprises ne veulent pas de ce type de solutions métiers, car elles sont typiquement portées par des éditeurs qui sont en même temps intégrateurs , constate Lionel Monnier (OET). Cela peut donc empêcher le client de changer d'inté-grateur. » À l'inverse, si l'on fait appel à un éditeur distinct de l'intégrateur, il est possible d'en changer sans remettre en cause le logiciel. Cette exigence d'ouverture peut faire partie des requêtes du client.

Sans être spécialisés pour des secteurs aussi pointus, beaucoup de MES s'adressent à des types de process particuliers. Les opérations de production sont-elles plutôt manuelles, ou auto-matisées?A-t-on affaire à un process unitaire, ou continu ? Est-on soumis à des normes de traçabilité spécifiques ? Toutes ces questions peuvent aider à choisir la bonne solution : tandis que certains logiciels sont adaptés à l'agroalimentaire, d'autres sont plus efficaces pour l'aéronautique, qui produit des pièces à forte valeur ajoutée, sur lesquelles on effectue de nombreuses opérations. En cas de non-conformité, des retouches peuvent être effectuées. Un tel fonctionnement est donc très éloigné d'un process alimentaire en continu.





OET Assurer la facilité de prise en main pour les opérateurs est capital pour la réussite d'un projet de MES. Cela est facilité par des interfaces graphiques inspirées des applications grand public, accessibles depuis des terminaux mobiles.

Pour bien mener une démarche de mise en place d'un logiciel MES, les éditeurs et intégrateurs conseillent généralement de procéder pas à pas, en commençant par se concentrer sur une fonction précise. « Il ne faut pas forcément choisir un problème simple,sur lequel il y aurait trop peu de gains à réaliser, argumente Frédéric Henrionnet, responsable des grands comptes chez Infodream. Il faut surtout trouver quelque chose de représentatif pour l'ensemble de l'atelier, et commencer par un périmètre restreint. » « Il faut se demander sur quels points on est contraint, suggèreThomas Nouge-Berde (Siemens). L'audit est très important pour déceler les points d'amélioration.Cela orientera la mise en place du MES. » Il cite comme exemple le planning, une source de contraintes de plus en plus importantes, imposant d'être flexible tout en gérant des aléas de production, afin de respecter des délais. « Il faut chercher d'abord à faire de petites avancées,et obtenir des premiers gains avant de s'attaquer à des tâches plus complexes », estime Nicolas Stori (Astrée Software).

Jérôme Pasteur (SPC) conseille de ne pas perdre de vue les objectifs futurs : « c'est évident qu'il faut être pragmatique.Mais il ne faut pas non plus se limiter à des solutions répondant au problème du moment. Car comment passer ensuite au cap supérieur ? Nous recommandons de se poser la question de ce que l'on souhaite faire à l'avenir, afin de garantir l'agilité de l'entreprise. » Comment les solutions logicielles peuvent-elles évoluer ? Quelle est la feuille de route de l'éditeur ? Ces questions peuvent guider la réflexion vers une solution évolutive.

Avant de mettre en place un MES, le process doit être correctement modé-lisé: « l'outil doit pouvoir s'adapter à tous les cas de figure possibles, prévient Frédéric Henrionnet (Infodream). Si le process est mal défini, le risque est de se trouver face à des situations imprévues, qui seront plus compliquées à gérer sur un ordinateur que sur papier. » Éviter les zones de flou : cette dé marche s'applique également à l'interopérabilité. Il faut bien cerner en amont les échanges de données qui seront nécessaires avec les équipements, comme avec les systèmes d'information existants (ERP, GMAO…).

Récolter les données pour alimenter le MES

Les données sont la matière première des logiciels MES. Avant de se lancer dans la mise en place d'un tel projet, il faut donc s'assurer de la disponibilité des informations nécessaires. « Lorsque l'on a,dans une usine,des machines peu ou pas instrumentées,il faut soit envisager un suivi manuel, soit les rénover en y amenant des capteurs, prévient Jérôme Pasteur, responsable du département Conseil pour le groupe SPC. Mais il faut prendre en compte cette question en amont,pour ne pas se retrouver avec des fonctions impossibles à implémenter,alors que le projet sera lancé et les licences du logiciel déjà payées. » Cependant, les problèmes de ce type sont rares, estime Nicolas Stori, PDG d'Astrée Software: « on explique parfois qu'il faut collecter beaucoup de données machines pour faire fonctionner un MES.Mais sur 99% des installations,une à deux informations suffisent.Car,souvent, ce que les clients veulent mettre en place est suffisamment simple. » L'ajout d'un capteur, lorsque cela s'avère nécessaire, n'est généralement pas compliqué. Certaines solutions incluent même ce service: c'est un élément à prendre en compte dans le choix du logiciel. Cette mise en œuvre est d'autant plus facile qu'il existe aujourd'hui de nombreux capteurs sans fil. « On peut couvrir un site avec des émetteurs de type LoRaWAN et,ainsi,récupérer des informations qu'il aurait été coûteux d'aller chercher s'il avait fallu installer des câbles, précise Lionel Monnier, responsable commercial chez l'éditeur et intégrateur OET. Des agrégateurs peuvent même servir d'intermédiaires avec le MES,pour faire certains calculs en amont,ou accumuler les données sur une certaine durée avant de les transmettre ».

Des interfaces ergonomiques

L'appropriation du système par les opérateurs est également citée comme un facteur clé de réussite pour un projet MES. « La demande doit venir d'eux,il faut donc la susciter », suggère Nicolas Stori (Astrée Software). Ainsi, en remplaçant petit à petit certaines opérations faites sur le papier, on aide les utilisateurs à prendre conscience des avantages du système. Les MES intègrent aujourd'hui largement la question de la mobilité : il est possible d'y accéder via des terminaux tels que des téléphones ou tablettes numériques. « Cela donne accès à des interfaces parfois plus simples que sur un PC classique,que certaines personnes ont du mal à prendre en main », note Sylvie Castagnéris-Nambotin (Infodream). On retrouve ainsi des interactions semblables à celles auxquelles nous habituent les applications grand public. De plus, les terminaux mobiles permettent de naviguer d'une machine à l'autre. « Cela diminue le nombre de postes physiques à installer, argumente Lionel Monnier (OET). Mais attention : pour que cela fonctionne, il faut assurer une couvertureWi-Fi bien dimensionnée dans l'ate-lier.Sinon,la performance du système sera limitée.Communiquer des instructions en vidéo,par exemple,nécessite une bande passante correcte. » Après la mobilité, quelles seront les prochaines tendances pour les MES? Certains éditeurs proposent d'ores et déjà des versions de leur logiciel hébergées en cloud. Ce nouveau mode d'accès réduit l'investissement initial et le transforme en coût de fonctionnement. « On évite ainsi l'installation de serveurs, précise Lionel Monnier. Les industriels n'ont pas tous les équipes informatiques nécessaires pour gérer cela. » Pour éviter les problèmes en cas de perte de connexion, il est possible d'utiliser de simples PC industriels en guise de tampons entre l'usine et le cloud : ceux-ci continuent d'enregistrer localement les informations, et les transmettent une fois la connexion rétablie. « Les industriels réfléchissent de plus en plus à se tourner vers du cloud, afin de réduire leurs coûts de maintenance, commente Thomas Nouge-Berde (Siemens). Il reste toutefois des choses à régler, il y a notamment une frilosité vis-à-vis de la sécurité. Mais je pense qu'à terme, le cloud prendra le dessus sur le mode de fonctionnement standard ».





Le MES doit savoir communiquer avec les autres logiciels de l'usine, pour assurer la fluidité et la continuité du système d'information.

Rockwell Automation

La réalité augmentée (AR) est une autre piste de travail pour certains éditeurs. Cette technologie, souvent encore au stade de démonstrateur, consiste à afficher des informations dans le champ visuel d'un opérateur muni de lunettes spéciales, ou via une tablette. « Cela permet le suivi et le guidage de l'opérateur sur une chaîne de montage, décrit Frédéric Henrionnet (Infodream). Il peut par exemple voir les boulons à visser,dans quel ordre, et avec quel couple de serrage. Ces informations viennent du MES. Elles peuvent aussi être partagées avec des outils tels que les visseuses asservies.Cela ne change pas la fonction de base des MES,mais il faut savoir communiquer avec ces technologies ».

À l'avenir, l'industrie 4.0 devrait aussi pousser les usines vers une plus grande personnalisation de leurs produits. Les MES ont, là aussi, un rôle important à jouer. « Mais l'outil ne sera qu'un complément à la transformation de la production, qui doit passer aussi par une réorganisation industrielle et humaine, estime Jérôme Pasteur (SPC). Il faut donc, dès aujourd'hui, repenser l'organisation en se demandant quels seront les enjeux pour les dix prochaines années ».

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