Les caméras infrarouges pour la maintenance

Le 01/10/2015 à 13:30

L orsque l'on parle de thermographie portable, l'exemple qui vient immédiatement à l'esprit est celui du contrôle d'une armoire électrique et l'identification d'éventuels points chauds à l'intérieur. Mais ce serait restreindre ce marché à la partie émergée d'un iceberg que de se cantonner à ce cas de figure. On utilise en effet des caméras thermographiques portables dans bien d'autres applications et industries: le contrôle de fours ou d'enceintes thermiques, la maintenance générale (pneumatique, hydraulique), la surveillance des machines tournantes en mécanique… « En plus des maintenances électrique et mécanique, la troisième grande application est évidemment le bâtiment et l'efficacité énergétique. Et l'on trouve encore des applications dans les stations d'épuration, l'agroalimentaire, le ferroviaire, etc.», ajoute Marc Albrecht, chef de produits Contrôle et mesures physiques chez Chauvin Arnoux.

S'il y a peu d'acteurs sur lemarchédelathermographie portable, c'est que le ticket d'entrée est très élevé. Les sociétés ont deux manières de faire : soit elles labellisent des produits asiatiques, soit elles assemblent elles-mêmes les différents composants et, dans ce cas, les investissements sont effectivement beaucoup plus élevés.

Ce qui fait dire àThierry Lorioux, gérant de Mesure, Process-Control (MPC), vice-présidentetformateuràl'Associa-tion française de thermographie infrarouge dans le bâtiment, l'industrie et la R&D (Aftib), que « la caméra thermographique portable est un outil indispensable dans la trousse du technicien de maintenance. Son spectre est tellement large dans l'industrie qu'elle est devenue le Metrix de la thermographie.» Dans cet article, nous ne nous intéresserons qu'aux caméras infrarouges mises en œuvre en maintenance industrielle, et non à celle destinées aux applications dans le bâtiment. Comme nous le verrons ultérieurement, les applications demaintenance industrielle imposent des exigences plus importantes aux caméras thermiques portables, en termes de performances notamment (températures plus élevées, matériaux parfois plus difficiles à mesurer), d'où les choix arbitraires parmi l'offre respective de chaque fabricant. « Mais, les produits étant de plus en plus performants, la frontière entre les modèles pour la maintenance et ceux pour le bâtiment est de plus en plus fine. Cette uniformisation se traduit par exemple par une même version T600 pour les deux segments de marché », constate toutefois Eric Biogeaud, responsable des ventes France et Benelux chez Flir Systems. La même tendance est d'ailleurs constatée du côté de l'américain Fluke.

Flu La caméra thermographique portable est devenue un outil indispensable dans la trousse du technicien de maintenance industrielle. Son spectre est tellement large dans l'industrie (inspection d'armoires électriques, contrôle de fours ou d'enceintes thermiques, surveillance des machines tournantes en mécanique, etc.) qu'elle est devenue le Metrix de la thermographie.

La situation actuelle ne reflète pas du tout le marché d'il y a même seulement une quinzaine d'années en arrière. Le marché des caméras infrarouges portables a en effet bien changé. Au lieu d'avoir un certain panel de fournisseurs, les utilisateurs n'avaient déjà qu'un choix (très) limité de fabricants sur le marché français. L'américain Flir Systems trustait le marché à l'époque –la société est toujours le numéro un mondial en imagerie thermique–, sans réelle concurrence. Ce n'est qu'à partir de ce moment que sont ensuite arrivés successivement (mais pas forcément dans cet ordre) l'américain Fluke, l'allemandTesto, le français ChauvinArnoux et plus récemment l'américain Keysight Technologies. « S'il y a peu d'acteurs, c'est que le ticket d'entrée sur ce marché est très élevé. Les sociétés ont deux manières de faire : soit elles labellisent des produits asiatiques ( rebranding ), soit elles assemblent elles-mêmes les différents composants (matrice, optique,électronique) et,dans ce cas,les investissements sont effectivement beaucoup plus élevés», explique Eric Biogeaud.

Un marché de l'industrie plutôt stable

L'arrivée de nouveaux fabricants fut concomitante à l'apparition d'un nouveau débouché pour les différents acteurs, à savoir le secteur du bâtiment au travers notamment de l'efficacité énergétique.D'où une croissance du marché des caméras thermographiques por-tables et la multiplication des annonces de nouveaux produits. Même s'il ne s'agit pas de maintenance industrielle, ce segment de marché a bénéficié de la baisse significative des prix. « Si le prix d'une caméra thermique s'étend aujourd'hui de 1 850 euros, pour le modèle 870, jusqu'à 15 000 euros, pour le 890, il fallait compter au moins le double il y a encore seulement cinq, six ans. Même un thermomètre infrarouge valait 5 000 euros il y a une dizaine d'années », affirme Philippe Guérin, responsableThermographie,Température, Analytique, etc. chezTesto France.

Ce que confirme Marc Albrecht (Chauvin Arnoux): « Les prix tendent à baisser d'une manière très rapide et le marché, en général,s'oriente également vers des modèles dotés d'une matrice inférieure à 160x120 pixels, d'où un budget moins important encore.» Si le bâtiment représenta il y a quelques années un nouveau débouché, à l'époque, pour les appareils de thermographie portables, des fabricants tels que

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Flir Systems misent aujourd'hui sur d'autres marchés… même le marché du grand public. « Le marché tend vers des caméras plus simples et plus abordables. C'est effectivement une évolution croissante qui a un effet bénéfique sur la prise de connaissance de la part des utilisateurs, sur un phénomène de démocratisation de la thermographie. Mais il existera toujours des outils très performants ou très robustes », constate Marc Albrecht (Chauvin Arnoux).

Testo Ces dernières années, l'une des principales évolutions concerne la baisse des prix des caméras thermiques. Il faut par exemple compter aujourd'hui 1 850 euros pour le modèle 870 et jusqu'à 15 000 euros pour une caméra infrarouge 890. Ces prix étaient au moins le double il y a encore seulement cinq, six ans…

« En plus d'être basée sur des corners avec des produits plus simples (mais performants) ou haut de gamme (comme la première caméra thermique HD T1020), notre stratégie s'appuie aussi sur la volonté de rendre l'infrarouge accessible au plus grand nombre », confirme Eric Biogeaud (Flir Systems). La société a ainsi lancé le capteur Lepton que l'on a retrouvé au cœur d'accessoires pour smartphones (Flir One), d'une caméra ultra-compacte (C2) et même dans un mesureur d'humidité relative (MR160). L'enjeu en vaut la chandelle. Selon le cabinet d'analyse américain Market & Market, le marché mondial de l'imagerie thermique est estimé à 7,25 milliards de dollars cette année, et afficherait un taux de croissance annuel pondéré (CAGR) de 6,6% entre 2015 et 2020. A cette date, le marché représenterait alors un montant de 10 milliards de dollars, tous secteurs confondus (militaire et défense pour la surveillance ou la détection de menaces, automobile, grand public avec les smartphones, industrie pour la maintenance, etc.).

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Revenons au monde de l'industrie. Après une période faste, avec une croissance à deux chiffres portée par le bâtiment, ces dix dernières années, le marché s'est calmé. « Depuis deux ans, on enregistre un ralentissement dans le bâtiment. Le marché reste stable dans l'industrie, parce que les utilisateurs continuent à s'équiper grâce à la baisse des prix », précise Matthieu Villebrun, du département Support technique de Fluke France. Il ne faut pas oublier que le contrôle des armoires électriques dans le cadre de la surveillance des tableaux basse tension (BT) est l'application la plus «populaire» en raison d'une obligation légale. « Les industriels concernés se doivent de faire appel à des opérateurs (en fait le binôme “opérateur et caméra”) certifiés par le Centre national de prévention et de protection (CNPP) pour le contrôle de toutes leurs installations électriques. Avec la délivrance d'un dossier de moins d'un an, comportant un compte rendu de contrôle Q19 et un rapport de contrôle, les industriels ont la garantie d'être remboursés par leurs assureurs en cas d'incendie d'origine électrique », rappelle Thierry Lorioux (Aftib). Ces mêmes industriels, qui sont de gros consommateurs d'électricité (métallurgie, sidérurgie, automobile…), spécifient de plus en plus des caméras infrarouges certifiées CNPP dans leurs appels d'offres, parce qu'ils recherchent également des critères de qualité pour les mesures.

Une caméra thermique rend visible la chaleur

Avant de nous intéresser à l'évolution technologique des caméras thermographiques, il est de bon ton de faire un petit rappel théorique. Découvert en 1800 parWilliam Herschel, le rayonnement infrarouge se distingue par une longueur d'onde comprise entre 0,78 et 1000 µm, sachant qu'il existe trois subdivisions: l'infrarouge proche (PIR) de 0,78 à 1,4µm, l'infrarouge moyen (MIR) de 1,4 à 3 µm et l'infrarouge lointain de 3 à 1000µm. L'intensité du rayonnement infrarouge émis par n'importe quel corps dépend de deux facteurs, à savoir la température de l'objet et la capacité du matériau composant le corps à émettre. Noter qu'à partir d'une température de +500°C, le rayonnement infrarouge devient visible,de couleur rouge. « La thermographie, elle, est une technique qui met en image les rayonnements infrarouges reçus par la scène observée par une

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caméra.En fait la thermographie sert à rendre visible la chaleur.Ce rayonnement est dit thermique parce qu'il est émis par la matière et que sa puissance dépend de la température », précise Philippe Guérin (Testo France). On ne peut pas évoquer la thermographie sans parler de la notion d'émissivité. Lorsqu'il arrive sur le matériau, le rayonnement électromagnétique peut être soit absorbé,soit réfléchi, soit transmis - il s'agit de la loi de Kirchoff. Dans le cas d'une absorption et d'une émission totales (100%), l'émissivité est égale à 1. Il s'agit donc d'un émetteur parfait et c'est ce que l'on appelle un corps noir. Ces derniers sont d'ailleurs très importants en thermographie, parce qu'ils permettent l'étalonnage des caméras infrarouges. On définit l'émissivité d'un corps réel comme sa capacité à émettre en comparaison de ce qu'émettrait un corps noir porté à la même température. Comme une partie du rayonnement électromagnétique est réfléchie et transmise, l'émissivité est alors une grandeur comprise entre 0 et 1.Voici quelques valeurs d'émissivité de différents matériaux, pour des longueurs d'onde comprises entre 8 et 12µm: 0,94 (bois), 0,85 (verre), 0,80 (acier), 0,43 (plomb), 0,09 (aluminium), etc.

Le rayonnement réfléchi est une source d'erreur

Un dernier mot sur les notions de réflexion, de transmission et d'émission. Selon la loi de conservation de l'énergie, la somme des rayonnements électromagnétiques quittant la surface d'un objet est toujours égale à 1. Comme un objet totalement opaque est caractérisé par une transmission égale à 0 –c'est le cas en thermographie pour la plupart des matériaux–, la formule précédente se résume à la somme des rayonnements réfléchis et émis valant 1. Donc si le rayonnement émis diminue pour une raison ou pour une autre, alors le rayonnement réfléchi augmente. En thermographie, il est donc extrêmement important de toujours tenir compte à la fois de ce qui vient d'un objet réel et de ce qui est réfléchi par son environnement. « Et l'on ne réalise que des mesures de surface ! La température d'un matériau étant liée à l'émission seule,des mesures thermographiques correctes n'ont de sens que sur des matériaux qui émettent suffisamment. En d'autres termes,le rayonnement réfléchi est vu comme une source d'erreur », poursuit Philippe Guérin.

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Pour « rendre visible la chaleur », le cœur d'une caméra thermographique est un microbolomètre, bien souvent à plan focal non refroidi pour les modèles destinés aux applications de maintenance. Le microbolomètre peut d'ailleurs représenter environ le tiers du prix d'une caméra infrarouge. « En n'étant pas refroidis, ces détecteurs permettent de réaliser des caméras très compactes, mais qui ne peuvent évidemment pas rivaliser, en termes de sensibilité thermique (NEDT),avec les modèles à détecteur refroidi, mis en œuvre en R&D principalement », précise Eric Biogeaud (Flir Systems). A noter que, s'il existe un certain nombre de fournisseurs de caméras thermographiques portables, les fabricants de microbolomètres pour ces appareils se comptent sur les doigts d'une seule main, avec notamment Flir Systems et le français Ulis. « L'évolution majeure en thermographie passe par la fabrication du capteur qui était à l'origine une technologie militaire. Le ticket d'entrée sur ce marché est en effet de plus en plus élevé de par l'évolution technologique rapide. Nous avons une maîtrise verticale du marché et des acquisitions permettent également de conserver nos parts de marché (qui augmentent régulièrement). La maîtrise du savoir-faire nous permet aussi d'être le seul fabricant à proposer une garantie de 10 ans sur le détecteur », affirme Eric Biogeaud.

Pour assurer la visualisation et une bonne exploitation desthermogrammes, les caméras infrarouges se doivent de disposer d'un affichage performant. L'écran tactile de 5,5 pouces de diagonale du modèle FI 160MI, qui se présente en fait sous la forme d'une tablette robuste, répond parfaitement à cette exigence.

Distrame

Trois paramètres clés : résolution, NETD et FOV

Quel que soit le type de microbolomètre, on peut identifier trois principales spécifications: les caractéristiques métrologiques que sont la résolution et la sensibilité thermique, ainsi qu'un critère optique (le FOV). Le détecteur est une matrice dont la résolution s'exprime en pixels. On peut trouver aussi bien des caméras dotées d'un détecteur de 80 x 60 pixels que des modèles à très haute résolution (384 x288 pixels, voire 640x480 pixels en standard). « On range souvent les caméras selon trois segments de marché : celles avec une matrice de 160 x 120 pixels, celles avec une matrice de 320 x 240 pixels et celles dotées d'une matrice de 640 x480 pixels. Pour les applications de maintenance,on conseille une résolution minimale de 160 x 120 pixels,et le meilleur compromis prix/performances est un détecteur de 320 x 240 pixels », affirme mêmeThierry Lorioux (Aftib). « La taille de matrice ne veut rien dire prise toute seule.Par exemple,un détecteur de 80 x 60 pixels avec un petit angle de vue peut très bien convenir dans certaines applications», souligne Matthieu Villebrun (Fluke France). Pour Eric Biogeaud (Flir Systems), « nos modèles C2 et E4, même si leur résolution est de 80 x 60 pixels, offrent une image complètement adaptée aux exigences de la maintenance, grâce au mode d'amélioration de l'image MSX.»

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Autre caractéristique majeure, la sensibilité thermique ou NETD (Noise Equivalent Temperature Differenc e) représente la qualité intrinsèque d'un détecteur. Elle définit en effet le contraste thermique qui donne à l'image une certaine netteté. Suivant les modèles, on observe là aussi d'importantes différences, avec des sensibilités thermiques allant typiquement de 0,15 °C, ou 150mK, dans le pire des cas, à seulement 0,04°C (40mK). Il faut toutefois s'assurer que l'on compare des valeurs à la même température; la sensibilité thermique est généralement donnée à + 30 °C, mais pas toujours… « La valeur de NETD est ce qui différencie les caméras : 100 ou 150 mK suffisent dans le bâtiment, où les variations de température ne sont pas importantes (une dizaine de degrés Celsius),mais moins de 50mK (le haut de gamme) sont requis quand un utilisateur a affaire à une différence de 40°C dans un moteur ou une armoire », explique Matthieu Villebrun (Fluke France), ce que confirment d'autres fabricants.

Il est par ailleurs préférable de relier la sensibilité thermique à la fréquence d'analyse de la caméra, à savoir au temps d'intégration nécessaire pour obtenir une image bien nette. Avec un temps d'intégration important, on peut en effet obtenir un résultat convenable, sans que cela soit toutefois le signe d'une bonne résolution thermique. Comme la plupart des applications de maintenance sont basées sur l'inspection d'équipements statiques, il n'est donc pas nécessaire d'avoir une fréquence d'analyse élevée (50Hz, voire 9Hz, suffisent). L'étendue de mesure donne, elle aussi, une idée de la qualité d'un détecteur. La température minimale, en particulier, renseigne l'utilisateur sur la sensibilité de la caméra aux faibles flux thermiques. Aux plus hautes températures, le critère est moins décisif. La plupart des modèles présents sur le marché proposent une étendue de mesure comprise entre - 20 et +350°C ; les caméras, capables de mesurer jusqu'à des températures de +600, +800°C, voire +2000°C avec certaines options, correspondent à des besoins plus spécifiques (contrôles électriques en haute tension, inspections de portes de fours, contrôles de matériaux dans les industries sidérurgiques, etc.).

Les fabricants portent une attention toute particulière à tout ce qui peut rendre plus facile la vie des opérateurs. Cela peut être une autonomie exceptionnelle de 13 h (comme avec la CA 1950 DiaCAm de Chauvin Arnoux), des fonctionnalités telles que la fusion des images infrarouge et visible, la récupération de mesures électriques depuis d'autres appareils via Bluetooth, la création automatique de rapports, etc.

En ce qui concerne les critères liés à l'optique, le Fiel Of View (FOV) est indispensable pour s'assurer que l'équipement à contrôler se trouve bel et bien dans le champ de vision de la caméra. Ce dernier représente en effet le champ (en degrés) que verra la caméra avec l'objectif qui lui est intégré. Si l'application nécessite d'inspecter des objets de taille différente, mieux vaut s'assurer que l'on peut changer l'objectif, et, si oui, que l'on dispose d'objectifs adaptés à ce que l'on souhaite contrôler: un téléobjectif, si l'on est loin de la cible (ou si l'on doit observer de petits objets à grande distance), un objectif grand angle, s'il faut au contraire contrôler un équipement de grande dimension avec très peu de recul, etc. Ceux qui ont eu l'occasion de lire la fiche technique d'une caméra thermographique se demandent alors à quoi peut bien correspondre la valeur d'IFOV . L' Instantaneous Field Of View , lui, représente l'angle sous lequel la caméra verrait un objet représentant la projection du détecteur sur la scène thermique. Plus simplement, l'IFOV définit le rapport entre le champ de vision horizontal et le nombre de détecteurs sur une ligne. Un IFOV de 2,7 mrad, par exemple, signifie qu'un pixel du détecteur représente une surface de (2,7x2,7) mm 2 à une distance de 1m. Une autre caractéristique optique incontournable est la distance minimale de focalisation. Pour des soucis d'économie (liés en particulier à la taille des optiques), elle est souvent très différente d'une caméra à l'autre. Or, plus elle est petite, mieux c'est. Surtout lorsqu'on inspecte des objets de faibles dimensions… La règle d'or, dans ces cas-là, est que le point de mesure occupe au moins 3x3 pixels dans l'objet que l'on inspecte. Si cette surface dépasse celle de la cible, la mesure est faussée. Signalons que certaines caméras disposent d'une focale fixe et d'autres d'une focale réglable (manuellement ou automatiquement). Pour Matthieu Villebrun (Fluke France), « une focale fixe est plutôt privilégiée pour les utilisateurs débutants, parce qu'ils n'ont pas à se soucier de la mise au point s'ils sont à la bonne distance.» Thierry Lorioux (Aftib) est plus nuancé: « Les avis sont partagés sur la pertinence de l'autofocus.» Si la mise au point ne se fait pas exactement là où se trouve l'échauffement,dans une armoire électrique par exemple, on peut passer à côté du problème. « Et un réglage manuel permet d'aller chercher plus facilement un contact électrique au premier plan, au deuxième plan, voire au troisième plan », ajoute Philippe Guérin (Testo France).

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Un large éventail de fonctionnalités

Pour assurer la visualisation et une bonne exploitation des thermo-grammes, les caméras infrarouges se doivent de disposer d'un affichage performant. « Nous avons également fait un travail important sur l'IHM (Interface homme-machine, ndlr), afin de la rendre in-tuitive, conviviale et ergonomique. Cela s'est d'ailleurs traduit par des liens étroits entre les services des études et du marketing, lors du développement de la nouvelle caméra thermique CA 1950 DiaCAm. D'autant que la partie post-traitement est tout aussi importante, pour éditer très facilement un rapport, exporter les commentaires sous Word par exemple (CamReport), etc.», résume Marc Albrecht (Chauvin Arnoux). Flir Systems, entre autres, propose d'ailleurs une IHM commune pour tous ses modèles (interface utilisateur et logiciels identiques), ce qui permet à un utilisa-teur de monter en gamme sans période d'apprentissage.

Mais la liste des fonctionnalités ne s'arrête pas là. On peut par exemple citer la fusion des images infrarouges et vi-sibles, la mesure de distance par laser, la reconnaissance de l'endroit où se font les mesures (un site industriel peut regrouper une centaine d'armoires électriques) via une étiquette du type QR Code, la prise de vidéo pour voir l'évolution d'une température ou d'un process dans le temps, l'enregistrement de commentaires vocaux, la présence d'un module assistant pour la rédaction de rapports, etc.Avec laTherm-AppTH de l'israélien Opgal, l'éventail des fonctions devient même infini… « Etant donné que laTherm-App se connecte à un smartphone Android, l'utilisateur dispose de toutes les fonctionnalités intégrées dans son smartphone. Les personnels de maintenance n'ayant pas qu'une seule tâche à faire, ils ont besoin d'outils plus évolués pour les accompagner,et donc d'un appareil le plus versatile possible », affirme Damien Legaie, docteur ingénieur à la division Thermographie de Distrame.

« Ces nouvelles fonctions rendent certes encore les caméras thermographiques plus simples à utiliser. Mais elles ne sont pas forcément appréciées par les ingénieurs et pourraient être jugées plutôt comme des gadgets », s'interroge Thierry Lorioux (Aftib). Il n'em-pêche que tous les fabricants ont fait des efforts importants ces dernières années pour améliorer toujours un peu plus la vie des utilisateurs. Cela peut par ailleurs se traduire par une autonomie exceptionnelle de 13 heures –tous les autres modèles fonctionnent entre 2 et 5h–, comme avec la caméra CA 1950 DiaCAm de Chauvin Arnoux ou la présence d'un grand écran (écran tactile 5,7 pouces orientable à 180° des TiX520 etTiX560 de Fluke) qui est très confortable quand on doit réaliser des inspections pendant une journée entière. « Nous avons fait le choix d'une caméra thermique se présentant sous la forme d'une tablette robuste. Elle se distingue par un écran tactile de 5,5 pouces de diagonale », explique Damien Legaie (Distrame).

Malgré la foultitude des fonctionnalités et le travail permanent des constructeurs pour rendre les caméras thermographiques encore plus simples à utiliser, il n'en reste pas moins que tous les acteurs du marché insistent sur l'obligation, pour les utilisateurs, de suivre une formation sur la thermographie.

Keysight Technologies

Une formation en thermographie est obligatoire

La connectivité est un autre élément mis en avant par les fabricants de caméras thermographiques. Fluke a par exemple lancé Fluke Connect ( voir page 30 ). « En plus de la mesure de température proprement dite, cette application pour smartphones Android et iPhone, basée sur le cloud, est un outil très intéressant pour les équipes de maintenance afin de partager les données à toutes les personnes d'une équipe où qu'elles soient », explique Matthieu Villebrun (Fluke France). Pour Marc Albrecht (Chauvin Arnoux), « l'évolution de la connectivité rend possible l'ajout d'informations à un thermogramme, pour en faciliter l'exploitation. » Cela peut être de contextualiser des mesures ou d'intégrer des valeurs de tension ou de courant, par exemple. Réelle avancée ou tendance à la mode, certains acteurs sont néanmoins plus dubitatifs sur la pérennité des objets communicants…

Malgré la foultitude des fonctionnalités et le travail permanent des constructeurs pour rendre les caméras thermographiques encore plus simples à utiliser, il n'en reste pas moins que tous les acteurs du marché insistent sur l'obligation, pour les utilisateurs, de suivre une formation sur la thermographie. « Une caméra thermographique est un outil qui paraît très simple (prendre une photographie,regarder l'image), mais qui ne l'est pas. Il faut que les utilisateurs aient les compétences pour parfaitement maîtriser les conditions, les paramètres, voire les bases mêmes de la thermographie. Dans l'industrie, il faut prendre des précautions en présence de pièces en mouvement,de matériau comme l'acier inoxydable, etc.», constate Philippe Guérin (Testo France). Ce que confirmeThierry Lorioux (Aftib): « Les thermogrammes sont difficiles à exploiter et l'on peut rapidement leur faire dire ce que l'on veut, à cause par exemple de la présence d'une réflexion parasite, d'une valeur d'émissivité incorrecte, etc. Une formation est indispensable pour éviter les pièges une fois sur le terrain.»

Selon Damien Legaie (Distrame), « Un apprentissage est toujours nécessaire, mais plutôt orienté vers le côté pratique et les résultats. On oublie trop souvent que la thermographie est une méthode optique. Une caméra infrarouge ne mesure que des températures de surface ou encore, si l'optique est sale, les mesures peuvent être faussées, etc. Les utilisateurs doivent donc acquérir de l'expérience après la “formation”, quitte à refaire des formations.» « Il y a en effet toujours besoin d'une formation lorsqu'on achète une caméra infrarouge, mais les personnes ne font pas toujours le pas. Mais ceux qui le franchissent ont raison, car il y a évidemment des notions de base à connaître et l'utilisateur doit également bien maîtriser ses équipements pour être capable d'interpréter au mieux les thermogrammes obtenus » , complète MatthieuVillebrun (Fluke France). La situation a donc bien changé en quelques années : auparavant, seules une ou deux personnes étaient formées dans les entreprises et les quelques caméras thermographiques restaient assez souvent dans les armoires. Aujourd'hui, la thermographie s'ouvre à bien d'autres applications, telles que celles concernant les pompes ou les moteurs, aidée en cela par la disponibilité de bien meilleurs outils, de véritables outils de travail.

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