Etalonner un analyseur de réseau vectoriel n'est pas si compliqué que cela!

Le 01/09/2015 à 14:00

L 'analyseur de réseau vectoriel ( Vector Network Analyzer ouVNA) est certainement l'instrument le plus polyvalent utilisé pour l'ingénierie RF et hyperfréquences. Il peut en effet évaluer pratiquement tous les types de composants, depuis de simples câbles, filtres et amplificateurs jusqu'à des sous-systèmes complexes. En mesurant les paramètres S, un analyseur de réseau vectoriel permet ainsi de caractériser les dispositifs sous test (DST) avec une très grande précision de mesure. Il y a cependant une limite pratique à cette précision: des imperfections sont inhérentes pour chaque appareil du fait des limites technologiques intrinsèques, des variations dans les matériaux et les procédés de fabrication. Les accessoires externes indispensables, tels que les câbles de test et les adaptateurs, introduisent également des imperfections pour les mêmes raisons.

L'étalonnage est le moyen par lequel les utilisateurs peuvent minimiser les erreurs de précision. Cette procédure est généralement effectuée chaque fois que l'appareil de mesure est configuré pour une mesure donnée. Le but est de supprimer les erreurs systéma-tiques attribuées à l'instrument lui-même et aux accessoires externes requis pour réaliser les tests. D'autres types d'erreurs aléatoires, telles que les dérives, la répétabilité des connecteurs et le bruit existent, mais elles ne peuvent pas être corrigées durant le processus d'étalonnage. En suivant les bonnes pratiques d'utilisation et de manipulation de l'analyseur de réseau vectoriel et de ses connecteurs, un ingénieur peut néanmoins réduire les effets des erreurs aléatoires.

Par essence, un analyseur de réseau vectoriel est un appareil avec une grande linéarité. Trois types d'imperfections limitent toutefois la précision de mesure de n'importe quel analyseur: l'adaptation brute ( Adaptation Match ), la réponse en fréquence et la directivité. L'adaptation brute d'un analyseur de réseau vectoriel est bonne, mais pas excellente. Il faut savoir que même une adaptation de 20dB peut amener des erreurs de mesure supérieures à 1dB. La correction de cette adaptation brute (à la fois l'adaptation de la source et l'adaptation du récepteur) réduit donc fortement ces erreurs.

Beaucoup d'analyseurs de réseau vectoriels modernes voient leur réponse en fréquence étalonnée en usine. Mais tout câble ou adaptateur externe connecté possède sa propre réponse en fréquence qui doit alors être étalonnée séparément, avant de réaliser des mesures de transmission ou de réflexion. Quant à la directivité, le coupleur d'un analyseur de réseau vectoriel sépare les signaux incidents des signaux réfléchis au dispositif sous test. Malheureusement, aucun coupleur n'est parfait et une certaine partie du signal incident est directement couplée dans le signal réfléchi. Cela a donc un impact sur les mesures des faibles coefficients de réflexion.

L'essentiel

P Les analyseurs de réseau vectoriels font partie des instruments de mesure les plus polyvalents dans le domaine de la RF et des hyperfréquences. Ce qui peut rendre leur étalonnage plutôt complexe.

P Le fabricant Anritsu rappelle la manière dont l'étalonnage de ce type d'appareils de mesure peut être réalisé de la meilleure façon possible, via notamment quatre principaux types d'étalonnage.

P Il s'agit aussi d'aider les utilisateurs à mieux comprendre les processus d'étalonnage, les techniques de correction d'erreurs et les nouvelles techniques développées.

Les quatre principaux types d'étalonnage sont le full two-port, l'étalonnage le plus souvent mis en œuvre et celui qui permet de corriger les 4 paramètres S, le full one-port, un étalonnage uniquement en réflexion avec lequel un seul port est corrigé, le one-path, two-port (un port est corrigé en réflexion et un chemin en transmission est partiellement corrigé) et la réponse en fréquence.

Quatre principaux types d'étalonnage

Exemple de valeurs résiduelles du MS4644B d'Anritsu après un calibrage 12 termes

Comme on l'a vu auparavant, l'étalonnage est une procédure permettant de corriger les différentes imperfections mentionnées auparavant. Plusieurs types d'étalonnage sont disponibles, chacun permettant de corriger les erreurs à différents niveaux. Les quatre principaux types d'étalonnage sont le full two-port , l'étalonnage le plus souvent mis en œuvre et celui qui permet de corriger les quatre paramètres S ( voir figure 1) , le full one-port , un étalonnage uniquement en réflexion avec lequel un seul port est corrigé –il est utilisé pour les mesures d'équipements un port, comme une antenne–,le one-path,two-port et la réponse en fréquence. Avec le onepath , two-port ,un port est corrigé en réflexion et un chemin en transmission est partiellement corrigé. Il n'y a alors pas de correction de l'adaptation de la charge; seuls les composants possédant une perte d'insertion de plus de 10dB devraient être mesurés avec ce type d'étalonnage. La réponse en fréquence, elle, est une normalisation plus qu'un réel étalonnage pour corriger un seul paramètre. En général, le choix de la technique d'étalonnage est déterminé par le nombre de ports de test utilisés lors de la mesure, la topologie matérielle de l'analyseur de réseau vectoriel et le niveau de précision souhaité. Chaque technique peut par ailleurs être modélisée. Les équations de calcul des erreurs sont alors résolues en mesurant des composants de référence étalonnés, et les résultats permettront la correction de mesure. Les composants de référence le plus souvent rencontrés sont les étalonnages OSLT pour Open, Short, Load,Through (circuit ouvert, court-circuit, charge, traversée), qui nécessitent un kit d'étalons parfaitement caractérisés ainsi que les techniques d'autoétalonnage LRL pour Line, Reflect, Line (ligne, réflexion, ligne), qui requièrent des étalons partiellement caractérisés.

Voilà pour la théorie, mais comment les utilisateurs doivent-ils procéder en pratique? Les processus d'étalonnage requièrent des équipements spécifiques 1 port et 2 ports qui sont normalement fournis par le fabricant de l'appareil de mesure sous la forme d'un kit d'étalonnage (voir photographie page 58) . A cause des contraintes inhérentes à la fabrication, les caractéristiques des composants d'un kit d'étalonnage s'écartent de celles des étalons idéaux, c'est la raison pour laquelle les écarts sont documentés sous la forme de coefficients qui doivent être saisis dans l'analyseur de réseau vectoriel avant de procéder à un étalonnage. Dans le cas contraire, la précision de l'étalonnage est compromise.

Alors qu'en théorie, n'importe quelcompo-sant connu peut être utilisé comme étalon d'étalonnage –du moment qu'il est bien caractérisé– les circuits ouverts, les courts-circuits, les charges et les lignes de transmission sont bien généralement les composants privilégiés pour réaliser les étalonnages. Ceci parce qu'ils sont faciles à fabriquer, qu'ils peuvent être caractérisés précisément et qu'ils sont disponibles pour différentes technologies telles que le coaxial,le guide d'onde et la ligne microstrip. Il est même probable que le composant le plus facile à fabriquer soit le court-circuit. La valeur de son coefficient de réflexion n'est pas égale à 1 uniquement à cause de son décalage en longueur.

Des étalons plus ou moins complexes à fabriquer

Cette longueur est en effet la différence entre le plan de référence du connecteur et le court-circuit réel. Les pertes sur cette longueur sont généralement ignorées dans la pratique. Quand cela est nécessaire, il peut être décrit en utilisant les coefficients polynomiaux L0 à L3. Pour les applications en guide d'ondes, un court-circuit peut être constitué uniquement d'une plaque de métal ou, dans le cas d'un court-circuit décalé ( offset short ), d'un élément de guide d'onde droit devant une plaque de métal. Des lignes de court-circuit sont également disponibles pour l'étalonnage des substrats en couches minces.

L'étalon «Circuit ouvert», lui, est un peu plus complexe à fabriquer. Alors que toute la longueur de ligne située avant le circuit ouvert doit être prise en compte, l'extrémité du conducteur interne crée également une capacité parasite dépendante de la fréquence. Cette capacité est généralement décrite en utilisant les composants polynomiaux C0 à C3, la dépendance en fréquence s'écrivant de la manière suivante: C(f)=C 0 +C1 xf+C2 xf 2 +C3 xf 3 .

L'étalon «Circuit ouvert» n'existe pas en guide d'onde, un court-circuit décalé est alors utilisé; il transforme le court-circuit en circuit ouvert, mais pour une bande de fréquences définie. Les circuits ouverts pour les lignes microstrips ou pour les substrats en couches minces existent, mais ils peuvent parfois être compliqués à caractériser.A leur place, des techniques d'étalonnage telles que LRL,TRL ( Through,Reflection,Line ouTraversée, Réflexion, Ligne) et LRM ( Line, Reflection, Match ou Ligne, Réflexion, Adaptation) pourront être utilisées.

L'analyseur de réseau vectoriel est certainement l'instrument le plus polyvalent utilisé pour l'ingénierie RF et hyperfréquences. Afin de s'assurer de la très grande précision de mesure au niveau des paramètres S, garante d'une bonne caractérisation des composants, l'étalonnage est le moyen par lequel les utilisateurs peuvent minimiser les erreurs de précision.

La charge (également appelée terminaison) est l'étalon dont l'impédance correspond à l'impédance du système. Dans la plupart des cas, la charge est constituée d'une résistance de précision qui est souvent ajustée pour fournir la meilleure performance d'adaptation en large bande. Des charges coaxiales sont aujourd'hui disponibles jusqu'à une fréquence de 145GHz (avec un connecteur de 0,8mm) pour effectuer l'étalonnage des instruments de mesure. Les lignes peuvent être utilisées de deux manières distinctes: en tant que traversée pour la connexion directe entre deux ports de test (dans le cas d'un étalonnage OSLT) ou en tant qu'étalon d'impédance permettant de fournir l'impédance caractéristique (dans le cas d'un calibrage LRL). La ligne de transmission «Traversée» est un composant 2 ports, nécessaire durant l'étalonnage pour déterminer les termes de correction de la transmission. Une ligne «Traversée » est généralement considérée sans perte et idéalement adaptée, mais il peut y avoir des cas où les pertes d'insertion doivent être prises en compte.

Les processus d'étalonnage requièrent des équipements spécifiques 1 port et 2 ports qui sont normalement fournis par le fabricant de l'appareil de mesure sous la forme d'un kit d'étalonnage. Il s'agit ici d'un kit d'étalonnage en technologie 1 mm pour les mesures coaxiales.

Un outil pour déterminer les incertitudes

L'une des questions habituelles liée à l'étalonnage des analyseurs de réseau vectoriels concerne la précision qui peut être atteinte après l'étalonnage. Les fabricants d'instruments de mesure spécifient généralement les valeurs résiduelles telles que la directivité, l'adaptation de source, l'adaptation de charge et la réponse en fréquence dans les caractéristiques (voir tableau page 56) . En fait, ces valeurs dépendent du kit d'étalonnage utilisé, de la méthode d'étalonnage et de la bande de fréquences. Comme ces valeurs spécifient le système complet, elles ne donnent donc pas d'indication sur l'incertitude réelle lors de la mesure d'un équipement spécifique. C'est pourquoi le japonais Anritsu a, par exemple, développé le logiciel gratuit Exact Uncertainty. Ce dernier permet à un utilisateur de calculer et de représenter graphiquement les courbes d'incertitude en transmission et en réflexion, lors de l'utilisation de l'un des modèles des familles d'analyseurs de réseau vectoriels Lightning ou VectorStar du fabricant.

Le logiciel prend en compte les nombreuses méthodes et kits d'étalonnage, ainsi que les variations des conditions de mesure telles que la bande passante de la fréquence intermédiaire. Il permet également d'utiliser des paramètres S11 et S22 différents de zéro (pour l'incertitude en transmission) et des paramètres S12 et S21 différents de zéro (pour l'incertitude en réflexion).Les courbes d'incertitude sont alors issues de modèles provenant de l'environnement de mesure. Le modèle utilisé dans le programme de calcul d'incertitudes d'Anritsu (voir la figure 2) inclut les paramètres importants de l'analyseur de réseau vectoriel et ceux de configuration de test, tels que les performances des connecteurs et des câbles, les paramètres du dispositif sous test.

Cet outil très utile permet à l'utilisateur d'un analyseur de réseau vectoriel de choisir les paramètres, à la fois pour l'instrument de test et pour les paramètres environnementaux, qui sont importants pour la configuration de la mesure à réaliser. L'avantage principal d'Exact Uncertainty est probablement sa capacité à donner à l'utilisateur les spécifications de paramètres S du dispositif sous test réel. En sachant que chaque paramètre S d'un composant 2 ports est influencé par les trois autres paramètres S. C'est la raison pour laquelle les calculs de précision de mesure deviennent bien plus réalistes lorsque le comportement réel du dispositif sous test est pris en compte.

Pour mieux comprendre, prenons l'exemple d'une incertitude réelle atteignable en réflexion pour un amplificateur de 10dB pré-sentant une adaptation d'impédance d'entrée de 20dB, testé avec un analyseur de réseau vectoriel MS4644B d'Anritsu (voir la figure 3) . La configuration de test utilise des câbles de test de 60cm, et une variation de température de 5°C a eu lieu pendant le test. L'étalonnage a été réalisé avec un kit d'étalonnage automatique Autocal 36585K du même fabricant entre 20 et 40GHz. Les points indiqués montrent que, dans ces conditions, la précision sur l'amplitude en réflexion est située entre ±0,7 et ±0,9dB.

Il faut noter que les pratiques de mesure de l'utilisateur ont également un impact important sur la précision obtenue. Ainsi utiliser une clé dynamométrique est obligatoire pour obtenir des résultats d'étalonnage répétables et de bonne qualité. Les connecteurs doivent être propres et manipulés avec précaution, et les étalons doivent être vérifiés régulièrement et, normalement, être étalonnés en comparaison avec des étalons internationaux tous les douze mois. Dans son travail quotidien, un utilisateur expérimenté peut également contrôler son étalonnage au moyen de composants de référence comme une ligne à air ou un atténuateur. Ou bien avec les composants d'un kit qui n'ont pas été utilisés lors du processus d'étalonnage. Bien qu'elles ne remplacent pas la procédure de vérification classique, à savoir avec un kit de vérification dédié, ces méthodes permettent un contrôle de qualité important et devraient être effectuées après chaque étalonnage.

Développer de nouvelles techniques d'étalonnage

Si les techniques d'étalonnage OSLT et LRL sont connues depuis des décennies,plusieurs tentatives ont été menées récemment pour améliorer la précision de l'étalonnage luimême, et également pour simplifier le processus d'étalonnage. Améliorer la précision de l'étalonnage, ce qui signifie réduire les termes d'erreurs résiduels, peut être réalisé de plusieurs manières. La précision peut en effet être améliorée en fabriquant de meilleurs étalons d'étalonnage. La qualité des charges s'est,par exemple,grandement améliorée ces dernières années. Alors qu'il était courant dans le passé d'utiliser une charge coulissante pour obtenir des mesures de perte de retour ( return loss ) de grande qualité, aujourd'hui, une charge large bande est généralement suffisante pour un bon étalonnage jusqu'à 70GHz.

L'amélioration du modèle de chaque composant d'étalonnage peut également augmenter la précision d'étalonnage. Alors qu'un circuit ouvert était toujours décrit par un modèle simple, la charge large bande est normalement supposée avoir une adaptation idéale avec G=0. Un modèle simple, conte-nant une inductance série et une capacité parallèle, est aujourd'hui parfois utilisé pour améliorer les charges adaptées sur les substrats en couches minces. Plus d'améliora-tions peuvent être obtenues en caractérisant individuellement chaque étalon pour un ensemble de fréquences données. Les fichiers S1P résultants pour le circuit ouvert, le court-circuit et la charge peuvent être utilisés pendant l'étalonnage à la place des modèles simples. Cette méthode est souvent décrite comme un étalonnage basé sur les données. L'un des prérequis importants des étalonnages basés sur les données est la capacité de caractériser les étalons avec une précision meilleure que celle atteinte par les modèles traditionnels.

Une autre tendance de l'étalonnage des ana-lyseurs de réseau vectoriels porte sur l'utilisation de modules d'étalonnage automa-tique. Ces derniers contiennent plusieurs étalons contrôlés par l'analyseur lui-même lors du processus d'étalonnage. Ces modules d'auto-étalonnage ont été initialement développés pour les lignes de production, afin d'éviter les erreurs d'étalonnage pouvant être faites par des personnels non qualifiés, ainsi que de réduire le temps d'étalonnage. L'amélioration des performances obtenues par les modulesAutocal d'Anritsu fait qu'ils sont aujourd'hui utilisés même enR&D. Chaque module Autocal nécessite des commutateurs pour sélectionner l'étalon approprié lors de l'étalonnage. L'utilisation de commutateurs mécaniques, comme dans le passé, dégrade significativement les performances, à cause de leur répétabilité et de leur durée de vie limitée. Les technologies de commutation électroniques utilisées dans les modules Autocal d'Anritsu fournissent aujourd'hui une meilleure précision qu'une charge coulissante jusqu'à des fréquences de 70GHz.

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