Le marché français du test et de la mesure a reculé de 9% en 2013

Le 01/06/2014 à 14:00

L'essentiel

Le Simtec a annoncé, en partenariat avec le cabinet Décision, les résultats du marché français du test et de la mesure pour l'année 2013, caractérisés par un recul annuel de 9%.

Même si les segments de marché des analyseurs de réseaux et du test affichent une hausse, les industriels ont en général perdu confiance…

Si l'on regarde par secteurs industriels, on se rend compte que la répartition est similaire d'une sur l'autre et que les potentiels de croissance sont là.

A près un optimisme raisonné il y a un an, nous affichons aujourd'hui plutôt un optimisme impatient » , a avancé Benoît Neel (Keysight Technologies France), président du syndicat de l'instrumentation de mesure, du test et de la conversion d'énergie dans le domaine de l'électronique (Simtec), lors de la présentation à la presse des résultats du marché français du test et mesure pour l'année 2013. Il est vrai qu'en passant de 333,068 millions d'euros en 2012 à 303,036Ma un an plus tard, soit un recul de 9%, il y a de quoi se poser des questions…

« Si nous parlions en effet il y a un an d'un optimisme raisonné pour l'année 2013, la réalité des faits a finalement été que le marché s'est contracté en raison principalement d'un rallongement des calendriers d'investissements. Les industriels attendent vraiment le dernier moment pour investir dans des équipements de test et de la mesure », poursuit Benoît Neel.A la fin de l'année 2012, les différents fabricants d'instruments de test et de mesure avaient pu encore bénéficier des «queues de budget», mais le phénomène ne s'est pas reproduit à la même époque de l'année suivante. « Il y a une perte de confiance de la part des industriels et beaucoup d'attentisme (et même plus encore maintenant) en France comparé aux autres pays européens », insiste Benoît Neel.

Chaque ligne de produits affichant une actualité propre, il n'est plus possible de définir des généralités pour toutes les lignes de produits. En 2013, on constate que le marché a fortement baissé pour six catégories et qu'il a progressé pour deux lignes de produits.

Ce que confirme d'ailleurs Bernard Dauger, consultant auprès du cabinet d'études et de conseils français Décision, partenaire du Simtec pour l'enquête: « Les intentions d'investissements signalés par les chefs d'entreprise à l'Insee ont chuté de 4 % en 2012 par rapport aux deux années précédentes. Si au début 2013 ils annonçaient des investissements à la hausse, ils n'ont toutefois pas cessé de réduire les montants annoncés tout au long de l'année pour finalement atteindre des investissements en recul de 7% par rapport à 2012.» Dans cette situation difficile, les intentions pour l'année 2014, annoncées en octobre 2013, puis en janvier 2014, ont néanmoins affiché des progressions respectives de 2% et 7%. Mais est-ce que ces prévisions vont se réaliser? Ou va-t-on revivre la situation de l'année précédente?

Le marché français du test et de la mesure 2013 a reculé de 9 % par rapport à l'année précédente, à 303,036 millions d'euros. Parmi les différents constats, la ventilation par marché est relativement constante d'une année sur l'autre, et les services ont, eux, également reculé sur la même période (-11,1 %, à 106,595 Me).

Toujours selon le cabinet Décision, le recul entre 2012 et 2013 du marché français du test et de la mesure est à rapprocher de la baisse importante des investissements en 2012 et en 2013. « L'une des conséquences en est la lenteur des décisions d'investissements suivie d'une accélération des procédures d'achat. Par ailleurs, même le secteur des services (étalonnage, maintenance, etc.) a connu une légère contraction en 2013, tandis que le marché de la location, lui, a crû », ajoute Bernard Dauger.

Des lignes de produits en recul de 20 %

Si la ventilation par marché est relativement constante d'une année sur l'autre (voir figure 2) , chaque ligne de produits, dont le poids reste comparable, affiche une actualité propre. « Nous ne pouvons en effet plus définir des généralités pour toutes les lignes de produits afin d'expliquer leur évolution passée et d'anticiper l'avenir », affirme Eric Fauxpoint (Anritsu France), membre du comité directeur du Simtec. On dénombre six catégories dont le marché a plus ou moins fortement baissé en 2013 (voir figure 1). En tête de ce «palmarès», le segment de marché de l'instrumentation d'énergie, des alimentations de laboratoire et de test a reculé de 22,2%, passant de 14,738 à 11,462Ma. « Nous avions touché le fonds en 2010 et depuis nous sommes sur une pente croissante,si l'on fait exception de l'année 2012 et de la sous-catégorie “Autres” en fort recul et qui varie d'une année sur l'autre. Il s'agit d'un segment de marché solide et lié à l'optimisation de l'énergie (dans les mobiles,par exemple) », constate néanmoins Olivier Grimaud (Keysight Technologies France).

Les deuxième et troisième lignes de produits sont respectivement les générateurs de signaux RF et micro-ondes (-21,1 %, à 8,203Ma) et les testeurs de radiocommunications (-19,7%, à 15,872Ma). « Le segment de marché des générateurs de signaux RF et micro-ondes subit les effets de la conjoncture et de la perte de confiance des industriels. Il s'agit d'un marché de remplacement dans les laboratoires de R&D (ce sont des appareils à très longue durée de vie),d'où un certain retour à la normale par rapport à 2011 », avance Eric Fauxpoint (Anritsu France). Les testeurs de radiocommunications, eux, visent deux types d'utilisateurs: les fabricants de chipsets et les opérateurs de réseaux. « Pour les premiers,ce secteur se distingue par de nombreux investissements par cycle (2G,3G, 4G/LTE…) et la fermeture de sites français, d'où traditionnellement un remplacement de parc important. En 2013, les fabricants de chipsets ont plutôt mis à jour leurs équipements existants », rappelle Yann Auffret (Rohde & Schwarz France). Quant aux opérateurs de réseaux, ils sont bien équipés pour le déploiement de la 4G et privilégient actuellement la location.

Autres catégories ayant également connu une baisse, les analyseurs de spectre, les télécommunications filaires et optiques ainsi que l'instrumentation modulaire et les logiciels associés ont respectivement affiché un recul de 18,6%, à 12,789Ma, 12,9%, à 15,847Ma, et 3,3%, à 50,09Ma. « La baisse pour les analyseurs de spectre a deux origines. Comme il s'agit d'appareils à usage général, les industriels ont d'une part facilement tendance à patienter avant de réinvestir.D'autre part,le concept de plate-forme associée à une longue liste de modules permet d'améliorer un instrument de mesure à moindre coût », constate Eric Fauxpoint (Anritsu France).Le marché des télécommunications filaires et optiques, lui, se caractérise par des segments en progression (déploiement de la fibre optique, du VDSL2 et des réseaux radio, test d'accès) et d'autres en recul (test des infrastructures, par exemple). Quant à l'instrumentation modulaire et logiciels associés, « lorsque l'on regarde l'évolution de cette ligne de produits, on identifie une certaine stabilité,en termes de nombre d'unités vendues.Mais la pression sur les prix fait que ces derniers diminuent.Une autre évolution,technique cette fois,porte sur l'augmentation de la taille des châssis dans lesquels les utilisateurs insèrent encore plus de modules » , avance Frédérick Drappier (National Instruments France), membre du comité directeur du Simtec.A noter que les modules de multimétrie,de génération,d'analyse spectrale ne sont pas comptabilisés dans cette catégorie.

Hausses pour les analyseurs de réseaux et le test

Pour terminer cette liste sur une note positive, c'est le cas de le dire, deux lignes de produits ont affiché une progression de leur marché en 2013. Il s'agit du test, avec une hausse de 14,2%, à 16,288Ma, et des analyseurs de réseaux RF et micro-ondes, avec une croissance de 14,9%, à 11,434Ma. « Pour le test,deux effets tirent le segment de marché.A force de différer les investissements, il arrive un moment où les industriels ne peuvent pas faire autrement que de remplacer leurs équipements (les coûts de maintenance deviennent par exemple trop élevés). Et la réparation représente un marché important pour les machines de test », indique Bruno Cohen (Cassidien Test & Services), membre du comité directeur du Simtec. Quant aux analyseurs de réseaux RF et micro-ondes, ils génèrent un vrai marché d'investissements. « Il s'agit en effet d'investissements très solides parce que ces instruments de mesure se retrouvent au cœur des projets de R&D en cours pour la caractérisation de composants non classiques et de nouveaux matériaux.Nous avons par ailleurs vu l'apparition d'appareils compacts performants et intégrés », précise Olivier Grimaud (KeysightTechnologies France).

Si les intentions des industriels en matière d'investissements pour 2014 étaient à la hausse en début d'année, comme l'indiquait le cabinet Décision, il n'empêche qu'il règne en France un très grand attentisme, ce que confirme d'ailleurs l'indice du Simtec pour le premier trimestre 2014 (993,15). « 2014 est, je pense, une année charnière pour les acteurs du test et de la mesure. Nous sommes tous en attente de mesures qui traduiraient la volonté du gouvernement de retenir l'industrie en France. C'est l'optimisme impatient que j'évoquais au début de la présentation », conclut Benoît Neel (KeysightTechnologies France).

Le marché du test et de la mesure vu du côté des secteurs industriels

Dans le cadre de l'enquête annuelle sur le marché français du test et de la mesure menée par le syndicat de l'instrumentation de mesure, du test et de la conversion d'énergie dans le domaine de l'électronique (Simtec), le cabinet d'études et de conseils français Décision s'est intéressé aux évolutions par grands secteurs industriels: aéronautique, défense et spatial, télécommunications, automobile, éducation et recherche ainsi qu'équipements industriels.

«L'aéronautique civile est toujours un secteur très porteur pour le test et la mesure, même si l'on enregistre une fin de cycle de R&D chez Airbus et aucun projet à court terme.Comme en 2012, le secteur de la défense a été relativement stable en 2013, des domaines comme la radio (écoute, interception) ou la guerre électronique n'étant pas touchés par les restrictions budgétaires », explique Bernard Dauger, consultant auprès du cabinet. Le secteur spatial européen et français en particulier souffre en ce moment, pris entre une concurrence accrue, la guerre des prix et la réduction d'effectifs chez Thales Alenia Space et Airbus Space & Defence (anciennement Astrium). La signature du contrat portant sur la vente de 126 Rafales à l'Inde pourrait changer la donne…

Dans le secteur des télécommunications, le marché du test et de la mesure est resté assez soutenu en 2013. Les investissements faits par les opérateurs sont restés stables parce qu'ils sont désormais bien équipés, comme les installateurs d'ailleurs, la valeur d'ARPU ( Average Revenue Per User ) ayant continué à baisser. «Les réseaux mobiles sont caractérisés par le déploiement massif de la 4G/LTE et même par le premier déploiement commercial d'un réseau LTE-Advanced au 2 e trimestre 2014. Même si l'on peut également compter sur la multiplication des small cells de tous types dans les zones de couverture denses et sur la R&D concernant la future technologie 5G, on s'interroge néanmoins sur la pérennité des investissements » , ajoute Bernard Dauger.

Dans le domaine des cœurs de réseaux aussi, de nombreux travaux en laboratoire sont menés sur les réseaux de 400Gbit/s, en quatre fois 100Gbit/s pour l'instant, en plus de la généralisation du 100Gbit/s proprement dit. «Le marché de l'accès en très haut débit a explosé en 2013, pour la partie FTTH (Fiber-tothe-Home, NDLR) notamment,et il devrait se poursuivre cette année et à l'avenir,le plan Très Haut Débit ayant pris du retard. Lesfabricants de puces destinées à la téléphonie mobile continuent à quitter la France, àl'image de Renesas Rennes et de Motorola Mobility à Toulouse », poursuit-il.

Dans l'industrie automobile, si la production de véhicules en France a atteint en 2013 son plus bas niveau depuis 1996, à 1,45 million d'unités, le marché du test et de la mesure a connu un très bon niveau d'activité avec des équipementiers qui se portent bien de par leur présence aussi à l'international. Les véhicules électriques, eux, ont un certain impact sur le test et la mesure pour ce qui concerne les batteries et leur recharge et la consommation en électricité des véhicules. «Les acteurs du test et de la mesure portent un grand intérêt au développement prometteur de la “voitureconnectée”qui constitue le premier segment des applications M2M par réseaux cellulaires », indique Bernard Dauger.

Les secteurs de l'éducation et de la recherche sont plutôt bien lotis. Les crédits de la recherche publique, où la tendance est toujours à la montée en fréquences pour des applications de télécommunications ou de radars, n'ont en effet pas diminué en 2013. Si le budget 2014 du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche progresse encore légèrement de 0,5%, les dotations aux grands organismes de recherche sont toutefois en baisse, d'où des tensions en termes d'investissements en test et mesure. L'éducation, elle, est un marché pluriannuel (dépendant de décisions prises au niveau de l'Etat dans le cadre des réformes), donc assez stable pour le test et la mesure. «Le marché de l'éducation fait l'objet d'un effort particulier de la part de la profession, afin de familiariser les jeunes avec les appareils qu'ils pourront être amenés à utiliser plus tard», rappelle Bernard Dauger.

Enfin, même constat positif pour les secteurs des équipements industriels. «L'énergie est le marché le plus porteur,en particulier pour tout ce qui concerne l'efficacité énergétique,moins pour les activités sur le territoire national que pour celles à l'international des acteurs français. Le secteur du ferroviaire est,lui, resté stable en 2013. Lesdéveloppements de la “voiture connectée”toucheront d'ailleurs également les autres modes de transport, dont le ferroviaire, dans le cadre d'une approche multimodale des services à l'usager », précise Bernard Dauger. Le médical, un marché en croissance grâce aux start-up développant des innovations en télémédecine et e-santé ainsi que des objets connectés, est toujours freiné par la difficulté de construire des business models . Au-delà de l'automobile, du médical et des produits grand public, le marché du M2M va toucher de nombreux secteurs industriels…

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