Les Capteurs Cmos Dévoilent Leurs Nouveaux Atouts

Le 01/10/2012 à 14:00

L'essentiel

La technologie CMOS connaît de nombreuses évolutions.

Grâce à une meilleure sensibilité et à un niveau de bruit plus faible, les capteurs peuvent convenir à un plus grand nombre d'applications, y compris en faible luminosité.

Le CCD reste privilégié dans les applications les plus complexes, ou requérant des développements spécifiques.

Après être restée pendant des années en retrait derrière les capteurs CCD, la technologie CMOS arrive désormais sur le devant de la scène. Ces derniers mois, les annonces se sont multipliées. La plupart des fabricants de capteurs (Aptina, CMOSIS, e2V, New Imaging Technologies, ON Semi­ conductor ou encoreViimagic, pour ne citer qu'eux) ont en effet profité des toutes der­ nières évolutions de la technologie pour ajouter à leur offre de nouveaux modèles dotés de fonctionnalités inédites. Ces cap­ teurs connaissent également un franc succès auprès des fabricants de caméras, qui sont désormais nombreux à en vanter les mérites. Signe des temps, la technologie CMOS devrait aussi être l'une des tendances phares du prochain salon Vision, qui se tiendra en novembre à Stuttgart…

Pourquoi une telle effervescence? Lors de l'introduction des pre­ miers capteurs d'ima­ ges à base de CMOS dans les années 1970, la technologie sem­ blait prometteuse. Par rapport aux CCD, qui dominaient alors lar­ gement le marché, elle offrait plusieurs avantages: sa compacité, sa faible consom­ mation, la possibilité d'adresser individuel­ lement chaque pixel de la matrice (et donc de lire uniquement les zones contenant l'information utile), ainsi qu'un éblouisse­ ment limité lors de l'exposition à de fortes intensités lumineuses.

Il existe désormais des caméras à capteur CMOS de hautes performances. Les modèles HXG à double sortie GigE de Baumer, par exemple, intègrent un capteur de CMOSIS doté d'un obturateur global, et d'une fonction de double échantillonnage destinée à réduire le bruit.

Baumer

Une question de sensibilité

Pendant les années qui ont suivi, la techno­ logie a connu un certain nombre d'évolu­ tions. Les progrès réalisés dans le domaine de la micro­informatique et la miniaturisa­ tion des transistors MOS ont permis de concevoir des capteurs plus performants et d'aboutir, au début des années 2000, à une certaine démocratisation des capteurs CMOS sur le marché de la vision. Seulement voilà, en termes de sensibilité et de qualité d'images, ils restaient encore nette­ ment inférieurs aux CCD. Pour le comprendre, il faut rappeler que dans un capteur CCD classique, les charges sont collectées dans le condensateur associé à chaque pixel, puis transférées de pixels en pixels jusqu'à une sortie commune, où elles sont conver­ ties en tension. Le facteur de remplissage du capteur, autrement dit la surface dédiée à la réception de la lumière, est donc optimal. Dans un capteur CMOS en revanche, la conversion s'effectue au niveau de chaque pixel. Celui­ci est entouré de transistors et d'amplificateurs qui permettent de convertir et d'amplifier le signal avant de le trans­ mettre à un multiplexeur de sortie.Tous les photons incidents n'atteignent donc pas la surface photosensible du capteur. Conséquence, le facteur de remplissage, et donc la sensibilité du capteur CMOS, sont plus faibles que ceux d'un CCD de même taille…

Autre inconvénient des premiers CMOS,leur mode de lecture. Les capteurs ont longtemps disposé d'un obturateur tournant (ou rolling shutter). Dans ce mode,les pixels sont lus consécutivement les uns après les autres, ligne par ligne. Entre lemoment où l'on commence àlirelamatrice,etcelui où l'on arrive au dernier pixel, il yadonc un déca­ lage temporel qui se traduit par une légère déformation géométrique de l'image. En raison deces diverses limitations, les cap­ teurs CMOSont fait leur entréesur le marché de la vision dans des caméras d'entrée de gamme destinées aux applications relative­ ment simples.Ils n'étaient préférés aux CCD que dans les situations nécessitant la sélec­ tion de régions d'intérêt, afin d'effectuer les contrôles àtrès hautes cadences.

De multiples évolutions

Mais les dernières annonces parues sur le marché prouvent que la donne aune nou­ velle fois changé. Le première évolution notableest le mode de lecture. Ces dernières années, un nombre croissant de capteurs CMOS ont adopté une fonction d'obturateur global (global shutter). Contrairement au principe de l'obturateur tournant, les pixels de la matrice sont tous lus en même temps. Il n'y adonc aucune distorsion des éléments géométriques de l'image lors de l'acquisi­ tion d'objets en mouvement. Lafonction, jusqu'à présent disponible sur des capteurs CMOS standards, est désormais accessible sur des modèles de haute résolution. Le belge CMOSIS,par exemple,aainsi introduit des capteurs àobturateur global dotés d'une matrice de 20 mégapixels.Demême,lader­ nière caméra d'Optronis dispose d'un cap­ teur de 25 mégapixels, lui aussi àobturateur global. «Lafonction global shutter sur des capteurs de résolution mégapixels est l'un des éléments clés qui permettent àlatechnologie CMOS de réduire l'écart qui la sépare du CCD » , souligne Emmanuel Maridor, directeur des ventes pour la France chez Framos.

L'allemand IDS aété l'un des premiers fabricants de caméras àcroire au potentiel de la technologie CMOS. Il propose une grande variété de modèles àcapteurs CMOS dotés d'une sensibilité élevée pour les applications de vision industrielle.

IDS

Ce mode de lecture est particulièrement recherché pour les applications de vision industrielle nécessitant la captured'objets en déplacement rapide.Mais il anéanmoins un inconvénient. «Les capteurs global shutter nécessitent l'intégration d'un plus grand nombredetran-sistors sur le composant, explique Gareth Powell, responsable marketing pour les capteurs d'image industriels chez e2v. C'est donc au détriment du facteur de remplissage du capteur » . Avec un obturateur tournant,le problème ne se pose pas.C'est pourquoi plusieurs fabri­ cants ont récemment introduit des capteurs dotés des deux modes de lecture(rolling et global shutter).C'est le cas par exemple chez e2V avec les gammes Sapphire etRuby, ou encore chez New Imaging Technologies, avec les modèles NSC1001 et NSC1003. Sur ces capteurs,le passage d'un mode de lecture àl'autres'effectue via un signal de contrôle, suivant les besoins de l'application: l'un pour capturer des objets en déplacement rapide,l'autrepour obtenir un meilleur rap­ portsignal/bruit dans les situations nécessi­ tant de grandes sensibilités.

Qu'ils soient àobturateur tournant ou glo­ bal, les capteurs CMOS ont aussi beaucoup progressé dans la réduction du niveau de bruit. «Tous les fabricants poursuivent cet objectif , confirme Gareth Powell (e2v). La tendance a été initiée par les besoins du marché grand public. Dans la téléphonie ou la photographie, par exemple,les fournisseurs conçoivent des capteurs qui offrent une résolution toujours plus élevée, tout en étant aussi de plus en plus compacts. Ils doivent donc utiliser des pixels de très petite taille (de l'ordre de 1,4 µm de côté). Mais plus le pixel est petit, moins il reçoit de lumière. Pour obtenir des performances correctes en termes de sensibilité à la lumière ambiante, il est donc nécessaire de trouver des solutions pour réduire le niveau de bruit » .

L'allemand Viimagic profitera du prochain salon Vision pour introduire une nouvelle gamme de capteurs CMOS de haute dynamique et faible bruit. Ces modèles conviennent aux applications nécessitant une qualité d'images élevée, y compris dans de faibles luminosités.

Viimagic

L'industrie atout naturellement profité de ces avancées. Pour obtenir des capteurs de grande sensibilité et de faible niveau de bruit, les fabricants rivalisent d'astuces. On trouve par exemple chez CMOSIS des pixels à 8 transistors associés à un système de double échantillonnage. Celui­ci conduit à réduire le bruit spatial fixe (FPN) et le bruit de lecture. D'autre part, la plupart des cap­ teurs CMOS intègrent désormais des micro­ lentilles qui contribuent à “diriger” un maximum de photons vers le pixel (afin de compenser la place que prend l'électronique associée à chacun d'entre eux). Un moyen d'accroître le facteur de remplissage du pixel, et donc son efficacité quantique. Enfin, il existe aussi des capteurs dotés de guides de lumière et de revêtements anti­reflets spéci­ fiques. « C'est le cas par exemple du capteur couleur MT9P006 d'Aptina, qui est intégré dans certaines de nos caméras. En termes de sensibilité, ce modèle peut éclipser sans peine les capteurs CCD » , assure Mithridate Mahmoudi, directeur commer­ cial pour les pays francophones chez IDS. Les photons pénètrent au sein du capteur par un guide de lumière. Celle­ci est confinée dans un faisceau collimaté et dirigée à travers plu­ sieurs couches à l'intérieur de la photodiode sans aucune perte liée aux reflets. « Le remplacement de la couche métallique d'oxyde d'aluminium par une couche d'oxyde de cuivre a permis de réduire significativement l'épaisseur traversée, et de supprimer les reflets. Ces avancées ont contribué à accroître la sensibilité dans le rouge et le vert de 30 %, et à diminuer le bruit de manière significative » , ajoute­t­on chez IDS. Le développe­ ment de capteurs de meilleure sensibilité élargit le champ d'applications de la techno­ logie CMOS. « Pour réaliser des contrôles dans des conditions de luminosité difficiles, par exemple, il est essentiel de disposer d'un capteur de faible niveau de bruit » , souligne Ralf Dohmen, cofonda­ teur et responsable produit deViimagic. De tels capteurs sont aussi privilégiés lorsque l'application requiert une précision élevée dans le rendu des couleurs.

Compacité, robustesse, rapidité… grâce à de multiples atouts, la technologie CMOS convient à une grande variété d'applications de vision. Le CCD, de son côté, reste privilégié pour les contrôles exigeants ou nécessitant des sensibilités élevées. C'est pourquoi plusieurs fabricants, comme Teledyne Dalsa, continuent à proposer les deux solutions.

Stemmer Imaging

Les capteurs “HDR”

Autre tendance incontournable, la multipli­ cation des fonctions HDR ( high dynamic range) conduisant à accroître la dynamique du cap­ teur d'images. L'intérêt consiste à observer des scènes qui comprennent à la fois des éléments clairs et sombres. Un capteur doté d'une grande dynamique peut en effet ac­ quérir des images contenant des zones très lumineuses sans arriver à saturation, et voir les détails présents dans les zones sombres sans être “ébloui” par la forte luminosité.

Les capteurs dotés de fonctions HDR existent pour la plupart d'entre eux depuis plusieurs années (voir Mesures n° 828 d'octobre 2010) . Mais « il y a cinq ou six ans, on ne trouvait cette technologie que sur des modèles de résolutionVGA, précise Emmanuel Maridor (Framos) . Désormais, elle est aussi accessible sur des capteurs de plusieurs millions de pixels » . Les principaux demandeurs sont le marché de la vidéo­ surveillance ou de la sécurité (où il faut souvent détecter des éléments plus ou moins sombres dans des conditions de luminosité variables, en extérieur, etc.), mais également la vision industrielle, pour contrôler des pièces en partie réfléchis­ santes ou des scènes très contrastées.

Sous le terme commun de HDR, il existe en réalité plusieurs technologies très différentes. Dans certains capteurs, la quantité de lumière stockée par les pixels susceptibles d'être saturés est automatiquement “remise à zéro” juste avant la fin du temps d'exposition.Dans d'autres cas, il est possible de prendre très rapidement plusieurs images de la même scène avec des temps d'exposi­ tion différents, et d'aboutir ensuite à une seule image rassemblant toutes les informations pertinentes. Il existe aussi des capteurs offrant de manière intrin­ sèque une dynamique élevée. C'est le cas en particulier chez New ImagingTechnologies. Grâce à une fonction qu'il a brevetée, le fa­ bricant français propose une gamme de cap­ teurs CMOS d'une dynamique supérieure à 140 dB, sans besoin de contrôle externe.

Une autre tendance du marché consiste à embarquer sur le composant CMOS un nombre croissant de fonctions (qui étaient auparavant assurées par l'électronique des caméras). « Contrairement aux CCD, le capteur CMOS offre la possibilité d'intégrer différents traitements sur le composant , précise Gareth Powell (e2v). Dans nos capteurs Sapphire, par exemple, il est possible de sélectionner quatre zones d'intérêt indépendantes dans une image (chacune d'entre elles pouvant disposer d'un temps d'intégration différent). Au final, c'est un peu comme si l'on avait quatre capteurs d'images avec la même optique.Cette fonction est intégrée au capteur,et contrôlée par un logiciel » .Autres outils disponibles sur le marché: l'exposition automatique, l'encodage vidéo, le réglage automatique du temps d'intégra­ tion, ou encore un transfert simplifié des informations de couleur… Cette évolution suit l'avancée du marché grand public et ses besoins de miniaturisation. Elle permet en effet de disposer de solutions compactes, et assure une certaine convivialité dans l'utili­ sation des capteurs CMOS.

Autre tendance issue elle aussi des applica­ tions grand public: le développement de capteurs offrant une résolution toujours plus élevée. Mais si cela répond à une demande dans la photographie ou la téléphonie mo­ bile, cela est moins crucial dans le milieu industriel. « Le besoin n'est pas le même , confirme Emmanuel Maridor (Framos). Dans les applications de vision, il ne s'agit pas de prendre une photo ou d'afficher une image de très haute résolution,mais d'assurer une détection ou un contrôle avec une certaine rapidité » . Il y a en effet des compromis à trouver entre la résolution et la vitesse d'acquisition. Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu'une image de plus haute résolution requiert nécessairement des capa­ cités de traitement supérieures. Enfin, « il est toujours possible de réaliser des capteurs de plus grande résolution, mais les composants optiques associés à des matrices de plus grande taille, par exemple, seront aussi plus coûteux » , souligne Gareth Powell (e2v). Pour accroître la réso­ lution sans augmenter les dimensions du capteur, la solution consiste à utiliser des pixels de plus en plus petits. « Mais dans les applications industrielles, il est préférable de ne pas descendre en dessous de 5 ou 6 µm, afin de ne pas dégrader les performances du capteur » , ajoute Gareth Powell. Seule exception, l'endoscopie industrielle, où il est parfois nécessaire de diminuer la taille des pixels afin d'obtenir des matrices de meilleure résolution dans un format miniature… Grâce à ces multiples avancées, le marché des capteurs CMOS connaît une très forte pro­ gression. La réduction du bruit et l'accrois­ sement de la sensibilité permettent à la tech­ nologie de rattraper son retard,et de combler peu à peu l'écart qui la séparait des capteurs CCD. Dans certaines applications, le CMOS peut même représenter une alternative avan­ tageuse aux CCD. C'est le cas en particulier des contrôles nécessitant des cadences éle­ vées, ou des applications de vision couleur. En revanche, « si la sensibilité des capteurs CMOS s'approche désormais de celle des CCD,elle ne pourra jamais la dépasser » , nuance Emmanuel Maridor (Framos). Malgré les micro­lentilles ou les systèmes de guides de lumière qui contribuent à compenser le fait que les pixels sont en partie “masqués” par l'électronique associée, le facteur de remplissage restera nécessairement plus faible que celui des CCD. Ainsi « dans les applications de vision les plus exigeantes,le CCD sera malgré tout privilégié » , pour­ suit Emmanuel Maridor. « Le coût de développement d'un CCD est aussi moins élevé que celui d'un CMOS , ajoute Gareth Powell (e2v). Si ce dernier convient désormais à toutes les applications standards,la réalisation de capteurs spécifiques reste plus aisée et moins coûteuse avec une matrice CCD » . Les deux technologies ont donc en­ core de beaux jours devant elles.

Le français New Imaging Technologies propose plusieurs gammes de capteurs CMOS HDR qui offrent de manière intrinsèque une dynamique particulièrement élevée (de l'ordre de 140 dB).

New Imaging Technologies

Pour en savoir plus

• Lire l'article « La technologie HDR dope la dynamique des capteurs d'images » publié dans Mesures n°828 d'octobre 2010 et accessible sur le site www.mesures.com dans la rubrique Archives

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