Moteurs et efficacité énergétique: une révolution se profile

Le 14/12/2018 à 14:00

L’attention constante dont fait l’objet le renforcement du rendement énergétique et de la durabilité dans l’industrie reste un moteur sous-jacent de premier plan pour l’innovation.

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L’association allemande des industriels de l’électrotechnique et de l’électronique (ZVEI pour Zentralverband Elektrotechnik und Electronikindustie) alancé leprojet de recherche DC-Industrie,conjointement avec 21 sociétés industrielles et quatre instituts de recherche.Ensemble,ils travaillent àla réalisation du projet de mise en œuvre de la transition énergétique dans la production industrielle,enrenforçant ainsi le rendement énergétique et l’assouplissement des systèmes énergétiques dans l’industrie. Parmi les participants prenant part àcette initiative setrouve la société Bauer Gear Motor, membre de la société Altra Industrial Motion. Nombreuses sont les entreprises industrielles qui devraient bénéficier poten-tiellement de ce projet de recherche; déjà, un constructeur automobile de premier plan envisage de mettre en œuvrecertaines des recommandations dans une nouvelle installation d’essais. Fortedeses connaissances techniques, Bauer Gear Motor souhaite vivement participer àlaréalisation de cette vision innovante, etdecontribuer de façon significativeàl’optimisation du rendement énergétique.

Dans le secteur industriel, l’emploi des moteurs électriques représente environ 70%delaconsommation d’électricité et constituent, de ce fait, la charge d’énergie électrique la plus élevée ( voir encadré page 32 ). Toute réduction des besoins énergétiques de ces systèmes d’entraînement par l’augmentation de leur rendement engendrerait une réduction correspondante des émissions de CO 2 .

Depuis le 1 er janvier 2017, tous les moteurs triphasés neufs vendus en Europe, avec une puissance nominale comprise entre 0,75 et 375kW, doivent être conformes àlaclasse d’efficacité énergétique IE3, ou, pour les applications avec convertisseurs de fréquence, àla classe IE2. Ces classes d’efficacité énergétique sont spécifiées pour des moteurs asynchrones triphasés, fonctionnant à une vitesse et un couple nominaux. Toutefois, la réalité montre qu’une régulation du rendement énergétique d’un composant ne peut réduire l’énergie de façon durable que dans certains modes d’exploitation. Dans cette perspective, l’objectif du projet DC-Industrie est de soutenir,par le biais de réseaux àcourant continu, la transition et le rendementénergétiques, ainsi que l’industrie 4.0. Le projet est parrainé par le ministère fédéral des Affaires économiques et de l’Énergie (Bundesministerium fürWirtschaft und Energie,BMWi) et porte sur une durée de trois ans.

Dans la solution proposée dans le projet DC-Industrie, il n’est pas nécessaire que la conversion du courant continu en courant alternatif soit effectuée par un convertisseur –cette infrastructure de réseau offre la possibilité d’optimiser l’achat d’énergie et la stabilisation du réseau.

Source: Bauer Gear Motor

Inefficacités dans la régulation de la vitesse

L’avantage de l’utilisation d’un convertisseur de fréquence consiste en l’adaptation continue de la vitesse du moteur àunbesoin réel, ce qui génère, très souvent, des économies d’énergie.Un convertisseur de fréquence est alimenté par un courant alternatif,qui est converti préalablement en courant continu à l’aide d’un redresseur. Le courant continuest ensuite convertiencourant alternatif avec une fréquence et une tension variables àtravers un convertisseur d’alimentation en tension, de façon à modifier électroniquement la vitesse d’un moteur triphasé. Toutefois, si le moteur triphasé est utilisé en mode de freinage,par exemple dans le cas d’une grue fonctionnant en mode de descente d’une charge,onassiste àune variation du flux d’énergie,une énergie qui ne peut cependant être réintégrée dans le réseau par le convertisseur de fréquence ,parce que le redresseur d’entrée ne permet le flux d’énergie que dans un sens exclusivement. En conséquence,l’énergie réintégrée doit être dissipée par le biais du circuit àcourant continu du convertisseur de fréquence.

Àcette fin, on branche,dans le circuit intermédiaire, un hacheur de freinage, qui contrôle la tension du circuit intermédiaire relativement au niveau de la tension: silatension du circuit inter-médiaire dépasse un certain seuil, le hacheur de freinage assurelacommutation de la résistance de freinage entre le pôle positif et le pôle négatif du circuit intermédiaire. Il s’agit généralement d’une résistance de freinage externe additionnelle qui convertit l’énergie de freinage en énergie thermique.

Réduction des problèmes d’harmonique

L’emploi croissant de convertisseurs de fréquence pour réguler la vitesse des moteurs adonné lieu àdes problèmes avec des effets au niveau du secteur, caractérisés par des harmoniques et une distorsion de la tension. Il n’existe aucune solution standard en ce qui concerne les harmoniques,étant donné que chaque réseau et sa charge électrique sont très différents.Endéfinitive, l’exploitant est responsabledelaqualité de la tension de ses propres installations de production. Si l’on assiste àl’installation croissante du nombredeconvertisseurs de fréquence,ouautres dispositifs avec une électronique de puissance, les effets sur le réseau se feront plus fréquents. Les problèmes posés indiquent qu’un renforcement de l’emploi de convertisseurs pour une régulation flexible des moteurs électriques est souhaitable, voire, très souvent, nécessaire. En effet, c’est le seul moyend’optimiser àlafois les procédés de production et le rendement énergétique, même si les perturbations des lignes sous l’effet des harmoniques,mais aussi le coût du matériel, limitent ce renforcement.

Les moteurs, un gisement d’économie d’énergie énorme

Pour se rendre compte du gisement d’économie d’énergie que représentent les moteurs électriques, rien de mieux que de jeter un œil sur les chiffres compilés par ABB, l’un des principaux fournisseurs mondiaux de systèmes d’entraînement, àpartir d’études réalisées, entre autres, par 4E Electric Motor Systems EMSA, The Economist, la Commission européenne, et l’Agence internationale de l’énergie.

Premier constat: ilressort de ces chiffres que le monde actuel aunappétit gargantuesque pour l’énergie électrique, puisque les projections prévoient une progression constante de 84%delaconsommation électrique mondiale sur la période 2015-2035 (de 21,9 à35,17 trillions de kWh).

Mais les chiffres les plus marquants de cette compilation sont les 42%delaconsommation électrique mondiale dévolus à l’industrie et que les deux tiers de cette électricité sont consommés par les moteurs. En d’autres termes, près de 28%del’énergie électrique totale consommée dans le monde l’est par les seuls moteurs, ce qui est tout bonnement énorme. La bonne nouvelle, c’est qu’en utilisant les technologies déjà disponibles, il est possible de réaliser des systèmes motorisés plus efficaces. De ce fait, les mesures d’efficacité énergétique sur les moteurs concourent à elles seules àlaréduction de leur consommation électrique (jusqu’à 60%, selon l’étude) en mettant en exergue les appareils les plus énergivores qu’il faudra remplacer par d’autres systèmes plus efficaces présentant de bien meilleurs rendements énergétiques.

Actuellement, le parc installé de moteurs électriques industriels s’élève àplus de 300 millions d’unités àtravers le monde, dont la moitié environ rien qu’aux États-Unis, en Europe et en Chine. Et ce nombre augmente de 10%chaque année. Et autre bonne nouvelle (si l’on peut dire), c’est que 90%des moteurs installés dans le monde fonctionnent en marche continue, àpleine puissance, et utilisent des systèmes mécaniques pour réguler la puissance nécessaire, ce qui revient àconduire en permanence le pied au plancher tout en utilisant le frein pour contrôleur la vitesse.

Cela signifie –etc’est là la bonne nouvelle– qu’en utilisant des variateurs de fréquence (ou de vitesse) pour contrôler les moteurs de sorte qu’ils utilisent seulement la quantité d’énergie électrique dont ils ont besoin en temps réel, il est possible de réaliser de grandes économies d’énergie. L’utilisation systématique de variateurs de vitesse permettrait ainsi d’économiser quelque 1,718 milliard de kWh, soit l’équivalent de l’énergie produite par 286 réacteurs nucléaires. Ànoter qu’un design amélioré des moteurs peut également mener à une augmentation de 30%durendement énergétique des moteurs. Compte tenu de l’immensité du parc de moteurs industriels dans le monde, les économies d’énergies sont réalisées progressivement, mais commencent àatteindre des montants conséquents. En particulier, l’étude estime que la législation sur l’efficacité énergétique des moteurs, mise en place par l’Union européenne en 2011, devrait mener àune économie de 135 milliards de kWh sur la période 2011-2020. Àtitre de comparaison, la régulation européenne qui préconise un passage aux ampoules éco-énergétiques permettra d’économiser «seulement»

40 milliards de kWh. Pour se faire une idée, 135 milliards de kWh, cela correspond peu ou prou àlaconsommation en énergie de Los Angeles pendant quasiment deux ans, ou àl’énergie nécessaire pour alimenter le train àgrande vitesse (300km/h) allemand ICE pendant 1500 ans. Financièrement parlant, cela représente une facture d’électricité de l’ordre de 12 à17milliards d’euros. Ce que révèlent également les chiffres compilés par ABB, c’est que la consommation d’énergie électrique représente une part très importante du coût total d’un moteur sur toute sa durée de vie (coût total =coût d’achat +coût d’exploitation et de maintenance +coût énergétique): 92%(par exemple, le moteur d’une pompe de 150kW fonctionnant 6jours par semaine et 50 semaines par an coûte environ 50000 euros d’électricité). De ce fait, le retour sur investissement (ROI), lorsque l’on met en œuvre des solutions d’efficacité énergétique au niveau des moteurs (variateurs de vitesse, moteurs àmeilleur rendement, etc.), s’avère relativement rapide (1 à3ans) et, en tout cas, compatible avec les exigences habituelles des industriels.

Mais il yauneffort important àfaire pour sensibiliser les entreprises sur ce point.

En effet, un rapport commissionné par ABB et réalisé par l’Economist Intelligence Unit montre que 46%des entreprises n’ont probablement pas encore de systèmes de gestion de l’énergie pour connaître et optimiser leur consommation d’électricité.

Pire encore, 42%d’entre elles pensent qu’il n’y apas d’intérêts financiers àprendre de telles mesures. Pascal Coutance

La réalisation d’un progrès significatif au niveau du rendement énergétiqueet de l’optimisation du coût du système nécessite donc l’adoption de nouvelles approches.Laréalisation d’un meilleur rendement énergétique,delatransition de l’énergie et du concept d’industrie 4.0 nécessite notamment de nouvelles structures du réseau.

Conception de la solution

La structuredunouveau réseau est tributaire d’une fourniture decourant alternatif,qui assure l’alimentation en courant continud’installations de production par le biais d’une centrale de redressement. Des filtres actifs du réseau sont intégrés dans la centrale de redressement, afin d’assurer la réalisation des exigences d’harmonique pour la qualité de la tension. Grâce àl’alimentation directe du convertisseur par un courant continu, toute la conversion décentralisée de l’énergie n’est plus nécessaire. Étant donné que la conversion centrale de l’énergie (du courant alternatif en courant continu) est sensiblement plus efficace, les pertes de conversion s’en trouvent fortement réduites.

Parlebiais de l’alimentation directe de tous les moteurs électriques àtravers un convertisseur de fréquence recevant une alimentation en courant continu, tous les moteurs installés sont connectés via

les moteurs installés sont connectés via un réseau commun sous tension en courant continu. En outre, un réseau de tension àcourant continunedonne lieu essentiellement qu’à des pertes de transmission ohmiques. Par rapport àun réseau en tension alternative, les pertes de ligne capacitives et inductives sont éliminées.

En outre, le réseau sous tension àcourant continuapporte la possibilité d’intégrer des panneaux photovoltaïques directement au niveau de la tension à courant continu.Dans ce cas également, il n’est pas nécessaireque la conversion du courant continuencourant alternatif soit effectuée par un convertisseur. Cette infrastructure deréseau offre la possibilité d’optimiser l’achatd’énergie et la stabilisation du réseau.

Parlebiais de l’élimination du redresseur d’entrée et du filtrederéseau pour les convertisseurs de fréquence,ces derniers peuvent êtreconçus de façon plus rentable etplus compacte, ensimplifiant ainsi l’intégration dans le moteur, ce qui peut accroître sensiblement le degré d’acceptation. Les moteurs àvitesse variable permettent une réduction des variantes, ainsi que des économies d’énergie;enoutre, ils fournissent des signaux d’état provenant de tous les moteurs àalimentation en courant continu, caractéristique de grande importance pour la régulation flexible et sans danger de la production.

Karl-Peter Simon, directeur général de Bauer Gear Motor

Bauer Gear Motor

Nombreuses sont les entreprises industrielles qui devraient bénéficier du projet de recherche DC-Industrie,développé par le ZVEI conjointement avec 21 sociétés industrielles et quatreinstituts de recherche. Déjà,un constructeur automobile de premier plan envisage de mettreenœuvrecertaines des recommandations de ce projet.

Grâce àlagestion du réseau, il est possible d’optimiser la gestion opérationnelle au niveau des frais énergétiques. Ces informations accessibles permettent des mesures préventives pour la régulation de la production, afin d’accroître sensiblement la disponibilité de la production, condition préalable pour une mise en œuvre réussie de l’industrie 4.0.

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